SYNTHÈSE
Quoique composite, l’édifice reprend le plan en équerre des grands manoirs bretons médiévaux, l’accent étant mis sur la tour d’angle dont le décor gothique flamboyant et une partie des pierres sont remployées du premier manoir. L’insertion de nombreux blasons qui participent de cette imagerie médiévale assoie la légitimité de ces familles.
Sous une apparence de régularité, le château du Brossais, la plus importante seigneurie de Saint-Gravé, révèle une structure complexe qui résulte des nombreuses campagnes de travaux qui ont accompagné son développement, la plus remarquable étant l’aile sud, basse, composée de salons en enfilade. Les traces de son évolution, de grand manoir médiéval au château historiciste du 19e siècle en passant par le classique plan du château 17e siècle à cour close limitée par un pavillon et sans doute la chapelle sont encore perceptibles.
Le château se développe dans un vaste domaine enclos de murs qui au nord de l’édifice forme un parc parcouru d’allées et qui abrite à l’ouest un vivier dont le fond est dallé. L’entrée à l’est est marquée par deux piliers en calcaire arborant deux blasons surmontés d’une couronne aujourd’hui peu lisibles, sans doute Chassonville et Cornulier ce qui les dateraient de la fin du 18e siècle. Cette entrée jouxte la ferme du château.
L’allée qui allait autrefois de la ferme à la pièce d’eau dénommée « étang du petit parc » sur le plan cadastral du 19e siècle a disparu au profit d’un chemin plus au sud. Il mène à l’entrée de la cour par le sud ; celle-ci était fermée, sans doute depuis le 17e siècle ou 18e siècle et jusque dans la 2e moitié du 19e siècle par une clôture avec grille avec entrée limitée par des piliers, probablement contemporains de ceux fermant le domaine à l’est. L’édifice est encadré par les communs à l’ouest, le jardin enclos à l’est au nord de la pièce d’eau.
Le château présente un plan en équerre dont les différents volumes sont bien individualisés au niveau des toitures et qui représente les diverses étapes de la construction : en émergent dans l’angle, la tour reconstruite au 19e siècle et à l’est le pavillon, également de la 2e moitié du 19e siècle. L’édifice se compose d’un corps central à un étage carré orienté au sud, accosté d’un pavillon à deux étages du 19e siècle à l’est, et prolongé vers l’ouest d’un corps du 17e siècle identifié par son toit à croupes, fortement masqué par l’aile de retour sans étage construite à la fin du 18e siècle se prolongeant vers le sud par les écuries.
Le corps central est enduit à rez-de-chaussée relativement bas, étage carré et étage en surcroît. Simple en profondeur, il est éclairé au nord et au sud. Les ouvertures de granite en arc segmentaire sont disposées en travées ordonnancées au sud ; au nord, les ouvertures sont plus simples, à linteau de bois échancré et seules deux lucarnes de bois à croupe débordante soulignent les travées externes. Le calcaire n’est employé qu’au niveau de la corniche au sud.
L’accent est mis sur la tour qui prolonge le corps central : elle est construite en pierre de taille remployée d’une tour du manoir médiéval disparu, même si la plupart des ouvertures et fleurons datent de sa reconstruction en 1854, à l’exception peut-être de la lucarne. Deux blasons avec les armes de Chassonville / La Boissière et la Boissière / Audren de Kerdrel sont insérés sur les pans obliques de la tour ; bien qu’elle ait l’apparence d’une tour d’escalier, cette dernière ne sert que d’entrée au château, l’escalier étant rejeté à l’arrière-plan et construit dans la 2e moitié 19e siècle (sans doute en même temps que la tour) dans une "dent creuse" figurant sur le plan cadastral de 1825, entre le corps central et le pavillon 17e siècle : la reprise est bien visible sur l’élévation nord.
Du pavillon nord-ouest, seule une travée est visible en façade aux ouvertures refaites en arc segmentaire comme les autres ouvertures ; cependant, les autres élévations montrent un traitement très différent en accord avec une datation du milieu ou de la 2e moitié du 17e siècle ; le rez-de-chaussée faiblement éclairé a un usage de cellier est surmonté d’un haut étage éclairé de fenêtres en pignon et au nord et coiffé d’un toit à croupes. Deux souches de cheminées, l’une sur le gouttereau nord, la seconde au pignon est montre l’emplacement des pièces à feu.
L’aile de retour se compose principalement de salons de réception en enfilade : si, comme le corps principal, elle est enduite avec ouvertures de même forme, elle ne possède pas d’étage carré. Les fenêtres sont disposées irrégulièrement, plus rapprochées au nord qu’au sud de la porte. La porte est surmontée d’un fronton semi-circulaire orné de deux blasons, Chassonville et Le Cornulier, tenus par des lions et surmontés d’une couronne comtale, ce qui date la construction de cette aile du mariage de Daniel de Chassonville et Jeanne de Cornulier en 1788 : ce mariage prestigieux incita dit-on le beau-père Le Cornulier, président à mortier du Parlement, à faire bâtir cette nouvelle aile pour sa fille. La partie nord est doublée d’un appentis ouvert de grandes fenêtres à usage de cellier ou office. L’aile se prolonge par les écuries : l’unité écurie-partie habitée est soulignée par un traitement identique des fenêtres et lucarnes, donnant l'illusion d'un très grand corps de logis. Le pignon sud s’ouvre d’une grande porte charretière qui accède à l’espace des écuries, divisé par des colonnes de bois et des stalles également en bois.
A l’est, le corps principal est augmenté dans la 2e moitié du 19e siècle d’un grand pavillon homogène à structure complexe : double en profondeur, il se compose de deux parties en ressaut sur le corps principal ; sur cour, il présente deux étages carrés avec une couverture polygonale sur plan carré, à l’arrière un seul étage ouvert d’une croupe. Une tour en oriel couverte d’un toit conique réunit les deux parties ; seules les façades sud et est sont enduites, la façade nord étant en moellon comme le reste du bâtiment. Les élévations à travées sont ouvertes de baies en arc segmentaire en granite, au contraire des ouvertures des élévations sur cour, en calcaire (à l’exception de celles de la tour).
Les dépendances ou communs se développent autour d’une cour secondaire à l’ouest du logis. Ils se composent d’un alignement à l’ouest et d’un bâtiment au sud. Dans l’alignement, chaque extrémité est occupée par un logis à étage à pièce unique surmonté d’un comble habitable encadrant des dépendances plus basses à comble à surcroît. Une reprise bien visible entre la dernière étable (?) et le logis nord montre que ce dernier a été rajouté pour créer cette symétrie. Les ouvertures sont en granite, sauf pour les portes des étables à linteau de bois.
La dépendance au sud a un étage carré ; sa façade principale à trois travées est orientée au nord. Elle comporte au rez-de-chaussée une cheminée de four dont le cul de four saille sur la façade sud peu éclairée.
(C. Toscer)
Chargée d'études à l'Inventaire