Le patrimoine maritime de la commune : un héritage culturel à géométrie variable dans le temps.
Quelle représentation culturelle de cette maritimité ?
L´identité maritime d´une commune littorale n´est pas figée une fois pour toute dans l´histoire de la commune et du « pays maritime ». Cette identité multiple et singulière est variable et a pu évoluer selon la qualité et la permanence des relations de ses habitants avec la mer et ses richesses (qu´elles soient biologiques, minérales ou paysagères). Il faut rappeler que la présence de la mer n´oblige pas son exploitation par les communes riveraines. Il n´y a pas de déterminisme naturel.
Saint-Cast le Guildo, une ruralité littorale et maritime importante au 19e siècle, qui va perdurer jusqu´au milieu du 20e siècle, avant de subir des mutations importantes et rapides, après guerre, avec le développement du tourisme balnéaire, et des activités agricoles et maritimes intensives.
Les limites de l´Inventaire.
Evoquer le patrimoine maritime de la commune de Saint-Cast-le-Guildo, avec ses limites territoriales entre le port Saint-Jean (l´Isle Avard et la rive gauche du Kermitton) et le port du Guildo, c´est omettre l´identité d´un terroir maritime plus vaste, côté terre et côté mer (entre la baie de la Fresnaye et la baie de l´Arguenon, jusque la pointe du Décollé), qui associe dans un premier périmètre les communes voisines du canton de Matignon (avec sa façade maritime Saint-Germain).
Pour exemple, le moulin à marée de port St-Jean, qui symbolise une forme aboutie de littoralité d´usages et d´échanges entre produits de la mer et produits de la terre, combinant le droit de pêche du meunier et sa fonction de transformation de la production agricole locale, est localisé en Matignon.
Les découpages administratifs ignorent souvent les projets de territoire à géométrie variable, selon les activités et les hommes qui l´habitent. L´ancienne commune rurale et maritime de Notre-Dame du Guildo, aujourd´hui rattachée à Saint-Cast, et la commune de Créhen sur l´autre rive de l´Arguenon se partagent cet espace maritime de l´Arguenon, avec ses aménagements portuaires (port du Guildo), les vestiges des pêcheries, des enrochements (pour dévier les courants et faciliter la navigation), le souvenir d´activités traditionnelles, comme la pêche à pied du chevrin (par les chevrinouères de St-Jacut et de St-Cast), la récolte du goémon, l´extraction de sable, de marne, pour engraisser les champs de chaque côté des deux rives.
Tout ce qui témoigne de cet héritage maritime, du point de vue du patrimoine immobilier et du patrimoine ethnologique doit s´exprimer de façon homogène et cohérente, dans une approche intégrée et globale de ce patrimoine et de son territoire. C´est avec cette méthode que nous pourrons réaliser un véritable diagnostic de territoire au niveau patrimonial.
Les représentations culturelles objectives de la culture maritime locale.
Aujourd´hui « la culture maritime » de Saint-Cast-le-Guildo s´exprime dans un certain nombre de « représentations culturelles » positives, étayées par des faits historiques (la bataille victorieuse de Saint-Cast sur les Anglais en 1758, l´ouverture des premiers hôtels pour touristes au début du 19e siècle, qui préfigure l´orientation touristique de la nouvelle station balnéaire, avec l´urbanisation massive de la côte et la naissance d´une nouvelle architecture littorale, sans oublier les manifestations, régates, jeux et sports de plage et les équipements portuaires correspondants).
Un fait naturel « les pierres sonnantes » dans la grève proche de Notre-Dame-du-Guildo, que l´on peut assimiler au « patrimoine sonore » de Saint-Cast apporte une spécificité originale à un phénomène acoustique minéral.
D´autres évènements ponctuent cette représentation de la maritimité de Saint-Cast : les drames de mer comme le naufrage du vapeur Hilda en 1905, de la frégate Laplace en 1950, la tempête de 1987. Il nous faut remarquer que certains de ces évènements sont commémorés, disposent d´un monument symbolique dominant la côte.
Cependant, aucune allusion imagée et représentative et de manifestations ostentatoires ne rappellent la participation des Castins à la grande Pêche à Terre-Neuve.
D´autres événements ponctuent la représentation de la maritimité de Saint-Cast : les drames de mer comme le naufrage du vapeur Hilda en 1905, de la frégate Laplace en 1950, la tempête de 1987. Il nous faut préciser que certains de ces évènements sont commémorés, disposent d´un monument symbolique dominant la côte et servent même de support culturel à un circuit de randonnée et de découverte de l´histoire de la commune (la bataille de Saint-Cast de 1758).
Une maritimité en perte de vitesse.
Cependant, certaines activités maritimes semblent avoir perdu de leur force mémorielle et de leur pouvoir d´évocation, hors présence de vestiges forts, de traces matérielles ou de représentation muséographique dans le domaine public ou privé. Nous citerons les pêches côtières (néanmoins représentées par le bateau de type Dragous, reconstruit à l´identique en 1987 et l´existence de quelques doris), la grande pêche à Terre-Neuve, le cabotage, la récolte du goémon, l´extraction de minéraux marins, la pêche à pied ou encore la défense côtière, le sauvetage en mer.
Les traces matérielles de ces activités ont pratiquement disparu : les batteries, fortins, corps de garde ont été rasées ou transformées. Les aménagements portuaires sont récents ou offrent peu d´intérêt architectural. Les édifices de signalisation maritime sont contemporains. Les traces des pêcheries en pierre (écluses) sont enfouies sous la vase, les lavoirs ont été comblés, la station de sauvetage détruite (comme le baromètre à mercure). Seul l´habitat domestique à la fois rural et littoral (par sa situation foncière et géographique, par la double activité de ses occupants « cultivateur-pêcheur ») offre un intérêt particulier, en raison de son bon état de conservation et d´une typologie particulière d´architecture simple, avec escalier extérieur, la réserve du cochon, et l´étable à vache, maisons alignées en rangées avec des façades communes.
Cependant, les collections mobilières liées à la grande pêche et aux pêches côtières peuvent être découvertes dans les familles, illustrées par des photographies, étayées par des témoignages, des expressions maritimes en Gallo (du vocabulaire maritime gallèsant), une certaine représentation de la côte avec sa toponymie et son histoire.
Le patrimoine ethnologique.
Le patrimoine ethnologique englobe autant les objets matériels, symboliques de l´activité humaine que l´ensemble des savoirs, savoir-faire et des représentations culturelles des communautés locales. C´est ce patrimoine que nous avons essayé de recueillir de façon orale, écrite et illustrée au niveau du patrimoine ethnologique : - des traditions orales : lexique, glossaire des termes maritimes associés au bestiaire maritime, aux activités de pêche, (pêche à pied, pêche d´estran, pêche côtière et grande pêche) et de cabotage, toponymie maritime et littorale ; - de la cartographie maritime (évolution de la cartographie maritime, des représentations topographiques et toponymiques du territoire côtier : carte des ingénieurs géographes du 18e siècle à nos jours) ; - des usages littoraux passés et présents, des savoir-faire, des connaissances techniques ; - de la représentation imagée de ce patrimoine
Avec les questionnements suivants : quels usages la commune a-t-elle de son patrimoine ? Comment se le représente-elle ? Comment le donne t-elle à voir, à comprendre ? (l´ethnologie du présent redéfinit le rapport au patrimoine). L´ethnologie permet d´évaluer une culture littorale, d´en donner les clés d´interprétation, d´en montrer les valeurs d´usage et les valeurs symboliques. Elle contribue ainsi à comprendre les mutations de la société littorale et ses enjeux.
Pour ne pas rester dans le domaine de l´évocation et de la transcription historique, nous avons sélectionné certains objets symboliques d´une activité maritime, pour illustrer notre propos ethnographique et historique.
Pour exemple : un rouet fabriqué à partir des bois d´épave du Hilda, un coffre de marin Terre-Neuvas, un couteau trancheur, une maquette de bateau.
Nous avons aussi sélectionné quelques formes d´architecture littorale : formes portuaires du Port du Vallais, du Port Jacquet et du port du Guildo, corps de garde, murets littoraux, maison de pêcheur, grenier à sel.
Littoralité et maritimité : des concepts scientifiques et ethnographiques.
Définition des littoraux et des gens de mer :
C´est justement cette dépendance et cette relation utile des riverains aux richesses de la mer et de son exploitation, qui caractérisent les notions de « littoralité d´usages » et de « maritimité », et permettent de qualifier et d´évaluer les relations des littoraux avec la mer. Les populations littorales étant considérées par le seul critère de situation, pour leur état de résident à proximité de la mer et de ses rivages. Cependant, la présence de la mer ne conditionne pas automatiquement son exploitation par ceux qui vivent sur la bande côtière.
L´indice INSEE de l´emploi maritime (à l´inverse de l´activité agricole) n´est pas suffisant pour caractériser le phénomène de littoralisation de Saint-cast et sa perte de maritimité, au sens sociologique de ces deux termes. Les retraités de la marine sont bien plus importants en nombre que les actifs de ce secteur.
Les littoraux forment des groupes sociaux singuliers, qu´ils soient strictement « gens de mer », vivant de la seule exploitation des ressources marines (marins-pêcheurs, marins du commerce), avec leurs lieux de résidence sur le littoral mais leur espace de vie et de travail en mer, ou ripuaires (de ripa, rive) qui travaillent et vivent sur le rivage (pêcheurs à pied, aquaculteurs, professions qui servent le navire, pilote, charpentier, calfat, ou celles de la filière pêche). Le 3e groupe de population est formé de ceux qui vivent des activités tertiaires, comme le tourisme mais également les administrations et le monde des agriculteurs côtiers. Plus difficiles à classer sont les pluri-actifs, qui combinent plusieurs activités d´opportunité, plusieurs métiers, comme agriculteurs-marins, que l´on retrouve ainsi dénommés au 1er quart du 18e siècle, dans l´enquête de Lemasson du Parc sur les côtes bretonnes en 1726 (Paroisse et bourg de Saint-Cast : 17 pêcheurs, dont 4 pêcheurs laboureurs, 2 parquiers, 2 tisserands-pêcheurs). Dans son procès-verbal Lemasson du Parc précise que « Presque tous pêcheurs de mer et de pied, et presque tous laboureurs, hors le temps de la moisson et de la culture des terres », et deux cent ans plus tard dans l´état civil de la commune de Saint-Cast pour certains Castins terre-neuvas, cette dénomination de « marins-cultivateurs » est reprise par l´officier d´état civil.
Ces marins Terre-Neuvas embarqués pendant des campagnes de 10 mois, avant la guerre 1914-18 et pour une durée de 7 mois ensuite (de mars à octobre), pouvaient participer pendant l´hiver à des taches rurales et agricoles ponctuelles et plus spécialisées (fabrication du cidre, des tonneaux, des fagots de bois). Ils n´en étaient pour autant des « paysans », mais se considéraient comme des marins et des gens de mer à part entière ; dont l´épouse tenait « son clos de misère », avec quelques arpents de terres, à l´écart des cultivateurs (collectage oral auprès de Michel Duédal, Jules Ohier).
A Saint-Cast, nous avons remarqué que les pêcheurs côtiers habitaient dans les quartiers urbanisés proches du port (et de leurs outils de travail), alors que les pêcheurs Terre-neuvas étaient disséminés dans la campagne environnante, dans les écarts, en groupes sociaux distincts, avec leurs lopins de terre, cultivés par leurs femmes. Les capitaines de navire (de pêche ou de commerce) habitent le village de la Garde, le Biot dans des maisons cossues à deux étages. L´habitat des pêcheurs à la côte se caractérise peu d´un habitat rural homogène, avec la cour, la souille à cochon construite en pierres plates de Saint-Cast. Parfois un os de mouton fiché dans le mur sert à crocher les raies, à sécher les filets. Le pêcheur hauturier, absent pendant une certaine période habite souvent dans de petites maisons à 1 étage, desservies par un escalier extérieur, qui sert de « chambre d´hôte », pour le navigateur.
Histoire et géographie maritimes.
Un littoral ressources.
Le territoire maritime de Saint-Cast-le-Guildo s´étend de la baie de la Fresnaye à la rivière de l´Arguenon (véritable estuaire, avec sa partie maritime). La morphologie de ce territoire géographique découpe et morcelle un linéaire côtier de 24 km, en autant de falaises, de pointes rocheuses et de plages ouvertes aux vents dominants (de nord ouest et de nordet), où niche dans des anses, des ports, havres naturels, privés d´infrastructures portuaires. Et c´est bien là son paradoxe maritime : Saint-Cast, jusqu´à la fin du 19e siècle ne dispose pas de véritables ports, avec digues, jetées, quais, terre-plein, môle et rampes d´accès. Les voies charretières menant à la mer sont rares et ne permettent pas de développer un commerce important avec l´intérieur des terres.
Seules les productions littorales de l´agriculture, des carrières, et de la pêche, peuvent transiter par le petit port du Valais ou du Guildo. C´est avant tout un littoral d´exploitation des richesses côtières, des pêches côtières et d´estran, des ressources minérales, des vases marines et du relief schisteux (carrières marines dont l´exploitation est attestée depuis le 5e siècle).
Un littoral stratégique [fig. 55 à 58].
Cependant, la presqu´île de Saint-Cast offre aussi un littoral stratégique, entre le Cap Fréhel et la pointe des Décollés, entre le Cap et les Ebihens, avec ses nombreuses pointes, aux noms évocateurs, à l´est de la pointe de Saint-Cast, dominé par le sémaphore : la pointe du Malouin, la pointe du Grouin, la pointe du Châtelet, la pointe de la Corbière, la pointe de l´Isle (port Pérou), qui surveillent les plages de la baie de la Fresnaye ; à l´ouest : le port du Vallais et le port Jacquet, la pointe de la Garde (port de la Bouvette), la pointe du Bay et la pointe de Tiqueras.
La baie de la Fresnaye représente l´avant-port de Saint-Malo, à l´est de Fort la Latte, dont les canons protègent les flottilles en relâche ou sur le grand départ vers Terre-Neuve (la morue séchée), l´Espagne (Cadix pour les toiles de Bretagne) ou les colonies espagnoles (les mines d´argent du Chili). Le commerce triangulaire amorcé au début du 17e siècle va permettre l´équipement de la côte de Penthièvre en batteries, fortifications, corps de garde, équipements de signalisation et de surveillance douanière sur les nombreuses pointes rocheuses, qui prolongent le territoire littoral. Corps de garde avec magasin à poudre sur le Grouin de St-Cast, avec batteries qui croisent ses feux avec ceux de l´île des Ebhiens, pour défendre la baie de la Fresnaye des corsaires ennemis, fort sur la pointe de la Corbière (disparu), corps de garde de la Corbière (figures de trois corps de garde et guérites), et de la pointe du Châtelet (4 murs actuellement visibles en ruines, sans charpente), poste des douanes de Port Jacquet, du Guildo.
Un nouveau paysage littoral balnéaire.
Les deux grandes plages de Saint-Cast, orientées à l´est, protégées de la houle d´ouest par le Cap Fréhel vont changer la vocation première de la commune.
Après avoir procuré aux Castins une rente halieutique précaire et mouvante, le littoral-ressources va transformer à la fin du 19e siècle et au début du 20e siècle ses friches littorales, ses landes (lotissements de la pointe de la Garde) et ses dunes (les Mielles), en production paysagère et en rente immobilière. Une nouvelle économie va apparaître : le tourisme, qui va modifier les rapports sociaux locaux et entraîner de nouvelles représentations du patrimoine et de son usage. De nouveaux usages du foncier maritime vont apparaître, avec les premières occupations du Domaine Public Maritime à titre privé (1890) : les plages vont accueillir les premières cabines de bain, un plongeoir, un toboggan flottant, des clubs de gym avec agrès, un casino, les premières courses de chevaux, de nouveaux projets ostréicoles.
En 1929, se fait jour la nécessité d´édifier une digue de défense, le long de la plage, à cause des ravages, que fait subir la mer au boulevard qui longe le rivage. Mr Brilhaut, architecte, en établit le projet en 1931. Le nouveau boulevard de la mer avec ses promenoirs en terrasse, ses rotondes, ses balustrades est terminé en 1934. Les infrastructures hôtelières vont se développer entre les deux guerres et aboutir au classement de la station en 1969, avec la construction d´un casino, d´une école de voile et la réalisation du nouveau port de pêche et de plaisance. Certains terrains du bord de mer échapperont à une urbanisation qui devient excessive ; la pointe de la Garde est acquise par la commune en 1949, qui y aménage un belvédère avec parking, et y élève un oratoire : Notre-Dame-de-la-Garde (figure Notre-Dame-de-la-Garde et Pen-Guen), en souvenir d´avoir été épargné par la guerre. Cette opération exemplaire n´évitera pas que d´autres terrains en bord de mer soient aménagés pour des golfs, des campings, des centres hippiques, et que les talus soient arasé.
Le littoral perd peu à peu son caractère « sauvage » et banalise ses aménagements. Une architecture balnéaire s´insère entre les maisons rurales et de pêcheurs, prend possession de la côte et de la « vue sur mer ».
Une histoire commémorative.
De la bataille de Saint-Cast aux naufrages du Hilda et de la frégate Laplace, les Castins ont su honorer leurs morts et les victimes d´évènements maritimes dramatiques, par des édicules réalisés à cet effet, par des ex-votos, par monuments commémoratifs et des croix.
Les usages maritimes passés et présents.
Ce dossier rassemble 14 collections, dont 9 objets consacrés spécifiquement à la Grande Pêche et 5 objets au cabotage ou au long cours. 2 collections sont à signaler : une corne de brume et une malle de Terre-Neuvas. 4 oeuvres méritent d´être étudiées : un coffret de navigation du 18e, une paire de sabots-bottes, une photographie du dernier quatre-mâts-goélette Terre-Neuvas français « Zazpiatbak », une photographie du dernier trois-mâts Terre-Neuvas français « Lieutenant René Guillon ».
La grande pêche à Terre-Neuve engage les hommes valides depuis le 16e siècle sur la Côte Nord en Bretagne, en particulier dans les cantons littoraux du Goëlo et du Penthièvre jusqu´à la Rance. Saint-Cast-le-Guildo et les communes environnantes participent de cette épopée qui va durer 5 siècles, avec son apogée au milieu du 19e siècle, au départ de Saint-Malo. En 1664, parmi les armements à la grande pêche, le « Petit Pierrot » de Saint-Cast, de 55 tonneaux, patronné par Pierre Loranz. En 1788, Le port de Saint-Malo envoie à Terre-Neuve 60 bateaux de 50 à 200 tonneaux, armés par des équipages de 20 à 80 hommes.
Le commerce triangulaire du 17e siècle se renouvelle au 19e siècle avec les ports du sud de la France et du Portugal.
Ce dossier rassemble 12 collections, outils, embarcations et objets représentés, dans la base Palissy, symboliques des activités littorales, côtières et d´estran, et une collection dans la base Mérimée (pêcherie).
Le bornage.
Le bornage fait partie du transport maritime, à moins de 40 milles des côtes, par un navire, jaugeant souvent moins de 100 tonneaux. Les modestes aménagements portuaires de Saint-Cast, au port de Vallais et du Guildo offraient un havre d´échouage aux navires, assurant le commerce des céréales, du bois, de la marne, des toiles, des primeurs, des huîtres, du poisson frais ou salé, et surtout de la pierre de Saint-Cast, fort prisée par les constructeurs. Le transport de la marne par des gabares ou chalands fait partie du bornage, quoique limité à l´estuaire de l´Arguenon. Le cabotage fait partie du commerce au long cours avec les pays d´Europe et d´Amérique du sud. Il dépendait davantage de Saint-Malo que des ports castins.
Les pêcheries.
Au 18e siècle, les pêcheries, fondations submergées, héritées des droits féodaux du Moyen-Age, sont encore nombreuses dans la baie de l´Arguenon ou de Quatre Vaux, avant de péricliter au siècle suivant (dernières traces dans la baie de Quatre Vaux vers 1945, sources J. C. Ménès et J.-P. Bihr). Les Jaguens plus nombreux en nombre de pêcheurs et les Castins se partagent âprement le territoire de la grève. 4 bouchots ou parcs de clayonnage en bois dépendent du territoire de St-Cast entre le port de la Mare et le port des Quatre Vaux. Dans la baie de la Fresnaye, St-Cast possède 6 pêcheries et un parc de pierre dit « l´écluse Gonien ». Les Jaguens disposent en 1726 de 30 pêcheries entre la baie des Quatre Vaux et la baie de Beaussais sur Lancieux, mais 10 paraissent abandonnées. Ces écluses servaient aussi de viviers. Elles sont affermées par les moines et les seigneurs aux pêcheurs locaux. En 1732, la plupart seront détruites par ordre de la Marine. La Révolution va permettre à de nouveaux détenteurs de gérer ses pêcheries.
Au 19e siècle, les pêcheries à poissons sont moins nombreuses en raison de la loi de 1852 sur les droits de pêche et l´essor de la grande pêche à Terre-Neuve. Les dernières pêcheries fonctionneront jusqu´à la fin du 19e siècle.
Les pêches côtières.
Jusqu´en 1930-40 et les débuts de la motorisation, les pêcheurs côtiers vont exercer leurs métiers à bord de différentes embarcation à voiles (boucadas, dragous, glaos, maquereautiers, sloops et doris), munies de gréement différents selon leurs fonctions et leur taille.
Les pêches côtières : pêche au chalut à la côte (dragous), pêche aux maquereaux aux plombs (lignes de crin), pêche au maquereau d´affare (chevlin ou chevrette, frai de crevette grise, ramené par les « chevrinouères » en baie de l´Arguenon), drague aux praires, puis aux coquilles St-Jacques, casiers pour les homards et araignées, cordes bouettées à la pestiche (gros vers de vase) ou aux manceaux (pieds de couteaux), sennes aux lançons et aux mulets en doris.
Au 19e siècle, les marins de Saint-Cast sont sous la tutelle du Syndic des gens de mer de Plévenon, qui dépend du quartier maritime de Saint-Brieuc. Les élus locaux, justifiant du grand nombre d´inscrits maritimes de la commune, demandent régulièrement le transfert du syndicat à Saint-Cast. Mais c´est de St-Jacut, dont vont dépendre en 1860, les pêcheurs de Saint-Cast. Dans les années 1960, c´est la station de St-Jacut de la mer qui aura ce privilège de « régner »sur les trois cantons de Ploubalay, Plancoët et Matignon. Ce qui correspond à la rivière maritime du Frémur, de la baie de Lancieux, de la baie de l´Arguenon et de la baie de la Fresnaye.
Jusqu´en 1922, il existe une station de pilotes lamaneurs à Saint-Cast. Ces pilotes font concurrence aux pilotes malouins pour le pilotage des navires qui fréquentent le port de Saint-Malo. Avant la seconde guerre, il n´y a plus que trois pilotes, dont Ange Fromont.
La pêche à pied .
La pêche aux poissons plats à l´aide de foëne et de grépinette, la pêche aux coques, la pêche aux manceaux (solen), la pêche aux chevlin, aux crevettes (havenet), aux huîtres, aux moules, aux petits crustacés (Figures d´outils de pêche : havenet et applet).
Coupe et récolte du goémon : le droit de coupe est réservé aux familles possédant des terres cultivables. Il est transmis héréditairement. Seul Le goëmon d´épave est libre de prise.
C´est le conseil municipal qui décide de la date d´ouverture et de cession de chaque campagne dans une période arrêtée par le préfet (de février à mai).
La période de l´après-guerre va voir apparaître de nouvelles mutations dans la population maritime et les métiers. Le déclin de la grande pêche, le développement de la Marine Marchande jusqu´à la fin des années 1970, le renouvellement des pêches côtières et de nouveaux acteurs maritimes, parfois étrangers au milieu pêche et au terroir local.
Les pêcheries traditionnelles vont être remplacées dans les années 1960 par les boucholeurs de moules et les ostréiculteurs dans la baie de la Fresnaye et la baie des Quatre-Vaux, initiées par des populations extérieures, venues des Charentes, alors que les Castins choisissent de pêcher de façon intensive la coquilles St-Jacques à l´aide grandes dragues et les araignées de mer au chalut.
L´estran, comme carrière.
L´extraction de la marne : cette activité occupait à la mauvaise saison d´hiver les cultivateurs des paroisses environnantes de l´Arguenon depuis Corseul jusqu´à St-Jacut, de Ploubalay à Matignon, du Guildo à Saint-Cast, par des chemins défoncés. Par la rivière de l´Arguenon, les gabares, menées aux avirons par des inscrits maritimes temporaires, remontaient jusqu´à Plancoët des chargements de marne. En ce temps, les populations plus éloignées réclamaient la canalisation de l´Arguenon jusqu´à Jugon. Ce projet fut d´ailleurs étudié avant l´arrivée du chemin de fer.
L´architecture littorale et portuaire.
Les voies maritimes :
Il y a moins de 150 ans, l´estran était utilisé comme voie de passage (guet de l´Arguenon), pour faciliter le déplacement des populations du littoral, pénalisées par le mauvais état et la longueur des routes intérieures, d´une rive à l´autre, et de la baie de la Fresnaye à la baie de Lancieux. La traversée en direct de Saint-Cast à Lancieux par Saint-Jacut était plus rapide et plus raisonnable qu´il n´y paraît. Le conseil d´arrondissement de Dinan du 18 octobre 1871 « recommande l´amélioration du balisage dans les baies du Guildo et de Lancieux, suivant un projet présenté le 13 juillet 1871. Plusieurs membres signalent comme utile l´établissement entre la côte de St-Cast et celle de St-Jacut, de balises au moyen desquelles les piétons pourraient éviter les inconvénients de s´enfoncer dans les vases mouvantes ».
Ce qui tendrait à prouver que le balisage littoral n´a pas une fonction exclusivement maritime, pour la navigation, mais fournit encore des repères pour les usagers de l´estran.
Néanmoins, il n´existe pas de signalisation lumineuse pour éclairer ces ports et leur accès depuis le large. Les communes ne veulent pas participer à l´entretien de ces feux qui seraient pourtant forts utiles à la navigation. Les seuls amers diurnes d´entrée de port sont le calvaire du moulin du Chêne (1881) et la tour Blanche, détruite en 1913. Il faudra attendre la construction du nouveau port de Saint-Cast dans les années 1970 pour qu´un fanal éclaire la digue de Saint-Cast.
Les ports sont aménagés au cours de la 2e moitié du 19e siècle, sur l´insistance des communes littorales, soutenues par les pétitions des pêcheurs côtiers et des commerçants. Leur architecture donne priorité à l´économie. Ce qui vaut au port du Vallais une succession d´ouvrages mal adaptés à sa situation de port d´échouage sans véritable voie d´accès aux routes commerciales (1886). La cale de la Bouvette n´offre pas non plus des conditions de sécurité pour haler et échouer les navires sur la cale. Seul le port du Guildo va bénéficier entre 1864 et 1920 d´aménagements spécifiques, articulant la construction de ponts, de quais, de terre-plein, de dessertes routières et de voie ferrée. En 1905, l´ingénieur Harel de la Noë va inaugurer un quai sur voûtes, qui servira de modèle à d´autres ports des Côtes du Nord (Lannion). Cet ensemble portuaire, qui a su jusqu´à aujourd´hui conserver ses traits de « port de caractère », mériterait d´être classé et aménagé pour éviter son envasement (double épi rocheux), et servir à la nouvelle plaisance de randonnée.
Chargée d'études d'Inventaire