L´ancien prieuré de Noyal-sur-Vilaine est un haut logis couvert d´un toit à deux versants, construit au nord de l´église probablement dans l´ancienne basse-cour de la motte castrale primitive des seigneurs de Noyal. Dès le XIIe siècle le prieuré de Noyal, assorti de dîmes et de rentes importantes, relevait de l´Abbaye Saint-Melaine de Rennes. Dans la deuxième moitié du XVIe siècle, François Thomé, d´abord trésorier du chapitre de Rennes puis prieur de Noyal et évêque de Saint-Malo, fit reconstruire vers 1570 l´édifice actuel dans lequel il fit de fréquents séjours. L´importance des revenus du prieuré et le rang du commanditaire expliquent la qualité de construction du logis, encore perceptible, malgré quelques remaniements tardifs.
L´ancienne cour, délimitée jusqu´au siècle dernier, par un mur irrégulier, au sud du côté du cimetière, et un autre rectiligne au nord, se prolongeait jusqu´au plus proche alignement de maisons actuelles en léger contrebas à l´ouest. Une interruption dans cet alignement correspond à l´ancienne entrée principale du prieuré décrite dans l´inventaire révolutionnaire.
Le logis prioral a peu changé dans son ensemble par rapport à sa description dans ce même inventaire. Sur la façade principale, il faut toutefois restituer, aux deux extrémités droite et gauche, les allèges des anciennes fenêtres de la salle et de la chambre sur cave, transformées en portes à une date très récente. La fenêtre à droite de la porte d´entrée a probablement été percée au XIXe siècle (peut-être à l´emplacement d´un ancien jour ?). Au-dessus, une baie moderne, en longueur, fait injure à l´harmonie générale de la façade. Sur cette porte, d´un beau style combinant accolade gothique et pilastres Renaissance, se devinent encore les armoiries du constructeur François Thomé, évêque de Saint-Malo et prieur de Noyal. Ces armes se retrouvent, très lisibles, sur la belle cheminée de la chambre de l´étage contre le pignon nord, présentées sur une large coquille.
Sur la façade postérieure, à l´étage, une ancienne porte murée, dans l´escalier, ouvrait sur une coursière de bois extérieure accrochée au mur et menant aux latrines de l´angle nord-est. Deux trous de poutres bouchés confirment l´existence de cette disposition, fréquente dans les manoirs aux XVe et XVIe siècles.
Le dégagement des enduits extérieurs a fait apparaître plusieurs fenêtres en briques percées tardivement, au XIXe siècle. L´une sur la façade principale, à droite de la porte d´entrée, deux autres, au rez-de-chaussée et à l´étage sur la façade postérieure. Ces ouvertures avaient été réalisées à l´économie, un enduit, appliqué sur l´ensemble des façades avec de faux chaînages peints qui escamotait les différences de matériau. Par contre, une ancienne porte murée dans la façade postérieure à l´étage, révèle une disposition d´origine fréquente dans les manoirs aux XVe et XVIe siècles. Cette porte ouvrait depuis l´escalier sur une coursière en bois extérieure qui menait à des latrines dans l´angle nord-est.
A l´intérieur, la suppression des doubles cloisons et des faux plafonds modernes a remis en évidence la qualité des baies d´origine, avec leurs ébrasements et arcs en pierre de taille, les plafonds à poutres et solives d´origine, et surtout, pour chacune des pièces, des cheminées soigneusement construites avec arc de décharge dans leur manteau. Au rez-de-chaussée, le dégagement du mur séparant la salle de la chambre sur cave a permis de redécouvrir une petite fenêtre intérieure ou judas dont le décor soigné est en accord avec celui des cheminées. Cette disposition, caractéristique des maisons seigneuriales, permettait de surveiller depuis la chambre les allées et venues et l´activité de la salle en contrebas.
La distribution de l´étage et la hauteur sous plafond des pièces témoignent d´un réel souci d´apparat. La chambre de l´évêque, dont on retrouve les armoiries au centre d´une coquille sur la cheminée, ouvre sur une vaste salle par une porte en plein cintre percée dans l´axe, disposition qui évoque les audiences épiscopales. La base de cette porte, est ornée d´une cordelière sculptée, attribut habituel de saint François, allusion probable au prénom du commanditaire. A l´arrière des chambres, au rez-de-chaussée et à l´étage, de petites pièces chauffées servaient de garde-robes ; dans leur angle nord-est des portes transformées en fenêtres devaient ouvrir sur des latrines.
La distribution originelle de l´étage est semblable à celle du rez-de-chaussée avec grande salle, chambre et garde-robe. Ces pièces, ainsi que celles du rez-de-chaussée, présentent une grande hauteur sous plafond et ont conservé leurs poutres et solives d´origine, très soigneusement équarries, posées tant plein que vide. A gauche de la belle cheminée de la chambre ornée des armes de son occupant, l´évêque François Thomé, une fenêtre, percée au début du siècle, a affaibli l´angle de l´édifice, tandis qu´une autre fenêtre, à droite, est d´origine.
Au sommet des murs de l´étage, un assemblage de sablières et d´entretoises relie les poutres qui forment aussi entrait pour la charpente. La toiture actuelle n´a plus sa pente d´origine qui était plus aiguë, la charpente ayant été modifiée au cours du XIXe siècle en réemployant la plupart des bois d´origine. A la même époque une pièce au-dessus de la cage d´escalier a été supprimée.
En résumé l´ancien prieuré de Noyal est un édifice de réelle qualité. Ce manoir reconstruit vers 1570 est bien représentatif du train de vie d´un prélat local aimant à y retrouver en villégiature, le calme de la vie champêtre.
Jean-Jacques Rioult,
Inventaire Général Bretagne,
mai 1999.