Dossier d’œuvre architecture IA56132177 | Réalisé par
  • enquête thématique régionale, Lycées en Bretagne
Lycée professionnel Bertrand Duguesclin, 50 rue Pierre Allio (Brec'h)
Œuvre étudiée

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Bretagne
  • Commune Brech
  • Adresse 50 rue Pierre Allio
  • Dénominations
    lycée

Le lycée professionnel Bertrand Du Guesclin présente un intérêt pour l'histoire des constructions scolaires : c'est l'un des exemples de la coopération entre l'architecte Yves Guillou et l'Entreprise du centre à Lorient, pour la construction industrialisée de plusieurs collèges d'enseignement technique dans le Morbihan et le Finistère, aux confins des années 1950-1960. Un exemple de réponse, ici entre 1958 et 1962, aux recherches du ministère pour construire vite (moins d'un an) et à bas coût.

Normes strictes, industrialisation, construction rapide : tous les ingrédients d'une architecture fruste sont réunis. Pourtant, la patte de l'architecte trouve à s'exprimer dans le plan masse, les couvertures en ardoise, le soin apporté au traitement des entrées et, surtout, le gymnase aux formes si singulières, élément essentiel de la composition de l'entrée de ce lycée professionnel, aujourd'hui labellisé "lycée des métiers d'art".

La collection de modèles en plâtres de l'établissement est l'une des plus importantes de Bretagne.

Un bas-relief d'Yves Bonnard est aujourd'hui la seule décoration du lycée au titre du 1% artistique encore visible.

L'héritier d'un cours professionnel obligatoire, ouvert en 1924

Le lycée professionnel Bertrand Du Guesclin est l'héritier d'un cours professionnel obligatoire, destiné aux apprentis, créé par la municipalité d'Auray, en 1924, en application de la loi du 25 juillet 1919 qui créé le CAP (certificat d'aptitude professionnelle). Ce cours, installé dans l'ancienne caserne Du Guesclin (voir PDF en annexe), devient, au gré des évolutions législatives et réglementaires, centre d'apprentissage, à la Libération, puis collège d'enseignement technique (CET), en 1959, lycée d'enseignement professionnel (LEP) en 1976, lycée professionnel, enfin, en 1986.

La précarité et la vétusté des installations - les ateliers sont installés dans des baraques - conduisent la Ville d'Auray à délibérer, le 22 novembre 1958, en faveur de l'achat d'un terrain sur la commune voisine de Brec'h, pour y implanter le centre d'apprentissage. Le site est proche des champs de l'ultime bataille (1364) de la guerre de succession de Bretagne. Opposé à Jean de Montfort, Du Guesclin combattait aux côtés de Charles de Blois qui perdit la vie au cours de cette bataille. C'est en mémoire de l'implantation dans la caserne et de cette bataille que la conseil d'administration de l'établissement, réuni le 16 janvier 1968, propose de donner au CET le nom du mercenaire. Le Conseil municipal du 8 mars 1968 donne un avis "très favorable" à ce sujet.

Un collège d'enseignement technique construit selon des procédés industrialisés.

Pour construire le nouvel établissement, l’État passe un marché avec une entreprise générale. Cette démarche est une illustration des recherches du ministère afin d'optimiser l'industrialisation des constructions scolaires, aux confins des années 1950-1960. Les objectifs sont clairs : construire fonctionnel, rapidement et à bas coûts. Afin de construire ce CET de garçons, pour un effectif de 350 élèves dont 270 internes et 45 demi-pensionnaires, il choisit comme prestataire, l'Entreprise du centre, implantée à Lorient. Celle-ci doit s'engager, en janvier 1962, à respecter les plans de l'architecte Yves Guillou, le devis descriptif et le planning de construction. Le contrat fixe le coût global à 3 078 060 NF (bâtiments proprement dits) et un montant de 382 066, 20 NF pour des travaux d'adaptation1. Le CET ouvre cette année-là, même si un délais complémentaire est nécessaire à la construction du gymnase. Plusieurs CET bretons, devenus aujourd'hui des lycées, ont été construits dans le cadre de ce type de marché entre l’État et cette entreprise générale, selon les plans donnés par le même architecte. A Auray, Yves Guillou a ainsi repris un modèle développé à Étel (56), en adaptant le plan masse au programme et à la parcelle2.

Les ateliers sont une première fois agrandis selon les plans du même architecte, dressés en 1967.

Depuis 1967, les principales extensions concernent encore les ateliers, avec la création de 1297 m2 supplémentaires, vers 1980 (Bouchet, architecte), puis leur extension et modernisation entre 2008 et 2012 (Lionel Dunet, architecte, plans de 2009).

Le lycée aujourd'hui

Le lycée a obtenu le label "lycée des métiers d'arts" en 2006. Il accueillait , en 2018-2019, 378 élèves, dont 172 internes. Il dispense des formations du CAP au baccalauréat professionnel, pour des brevets des métiers d'arts, dans les domaines de l'ébénisterie, de l'ameublement et du graphisme, ainsi que des formations pour adultes dans le domaine de la restauration des meubles anciens. Il accueille également des élèves "décrocheurs" pour des actions de remobilisation.

En 2020, une nouvelle cuisine est en cours de construction et une restructuration importante est à l'étude, afin d'améliorer les qualités thermiques des bâtiments. La démolition du gymnase et de l'internat est envisagée pour les remplacer par des constructions neuves.

1. La section spéciale des bâtiments d'enseignement du Conseil général des bâtiments de France, réunie le 30 octobre 1961, évaluait le "maximum de la dépense", sur la base d'un prix de base du m2 de 402,60 NF (avril 1961) à 4 804 720 NF, décoration et honoraires de l'architecte compris.

2. Les archives départementales du Morbihan conservent dans le fonds de l'architecte Yves Guillou, sous la cote 110 J 1592, un jeu de photographies en noir et blanc. L'intérêt de cette série nous a conduit à la reproduire intégralement en illustration de ce dossier. Les vues ont été prises peu après la construction du lycée, mais après l'agrément du sculpteur Yves Bonnard pour la réalisation de l’œuvre du 1% (8 novembre 1963), car les panneaux de pierre bleue de Belgique sont en place mais pas encore sculptés. Les photographies ne sont pas signées, mais Yves Guillou a souvent fait appel à Yves Guillemaut pour fixer ses œuvres à peine construites. Il est possible de penser que ces vues, nombreuses et valorisantes, ont été réalisées à des fins commerciales, pour montrer une réalisation appelée à être reproduite.

Le lycée se situe sur la commune de Brec'h, à environ 500 mètres d'Auray et de sa gare. Il est bordé par des lotissements d'habitations individuelles, sauf à l'est, où des prairies le séparent d'une chartreuse.

Il est implanté sur une parcelle d'un peu plus de 4 hectares, sur laquelle les espaces verts sont prégnants.

La section spéciale des bâtiments d'enseignement du Conseil général des bâtiments de France, réunie 4 juillet 1961, a approuvé le plan-masse de l'avant projet de construction du "Collège d'Enseignement Technique de Garçons n°919 à Auray, destiné à recevoir un effectif de 350 élèves", sous réserve, entre autres, des observations suivantes : "(...) prévoir 270 m2 d'annexes en plus de la surface des ateliers au programme, de réserver l'extension de ces ateliers ; de rapprocher le gymnase de l'externat(...)."

Le plan masse donné par Yves Guillou se caractérise par une implantation du bâti en bordure des deux tiers nord de la parcelle. Le tiers sud se partage entre prairies et terrains de sport. Entre les premières esquisses donnée le juin 1958 et les plans définitifs datés du 8 décembre 1961, le plan a peu évolué. Seuls les projets d'emplacements du gymnase et de l'administration ont varié. L'ensemble de ces deux bâtiments composent in fine le paysage de l'entrée du lycée. Le gymnase, de type A (20 X 13 m), au design très marqué est révélateur des intentions de l'architecte, tant en termes de formes que de matériaux, forme un événement architectural en contrepoint d'un bâti très standardisé. Par-delà ses formes, l'essentage d'ardoise le distingue des gymnases de sa génération.

L'administration (bâtiment A), l'externat (B), les ateliers (C), et le bâtiment regroupant l'internat (D), les services communs et la cuisine (E), sont construits selon des procédés industrialisés. La structure est en béton armée, les façades enduites de ciment lisse, les charpentes métalliques sont à treillis de cornières. La trame de 1,75 m est répétée autant que de besoin pour obtenir le nombre de salles de classe et de chambres prescrit par le programme. Contrairement à la plupart des constructions industrialisées respectant ces normes, la toiture présente des versants suffisamment pentus pour être visible. La couverture est en ardoise. Des formes et un matériau symbolique de l'architecture d'Yves Guillou, à la fois moderne et régionaliste.

Face à l'entrée, un bâtiment de plan rectangulaire héberge l'administration au rez-de-chaussée et les logements à l'étage.

Depuis le centre de la cour, de gauche à droite, en regardant vers le nord, sont implantés :

- L'externat de plan rectangulaire qui se distingue par sa hauteur (un seul niveau) et son principe de desserte des classes par un couloir central.

- Les ateliers sous sheds, précédés d'une galerie-préau, sont contigus à l'externat et positionnés à angle droit. Leur charpente est également métallique, en treillis de cornières.

- Les services communs, réfectoires, infirmerie, lingerie, etc. forment avec l'internat un plan en double équerre. Les premiers ont deux niveaux, le second en a trois, desservis par des latéraux et des cages d'escalier situées aux deux extrémités. Le long de la façade arrière du premier, en liaison directe avec le réfectoire, sont implantées les cuisines, de plan carré, éclairées en partie centrale par un lanternon. Des salles de classes et le foyer des élèves occupent le retour d'équerre, entre les deux ailes.

Hormis le gymnase, dans ce paysage d'architecture industrialisée, la plus grande attention a été portée au traitement des entrées des bâtiments. Les travées, parées de pierres de granite soigneusement agencées, sont dessinées avec soin. Les baies des escaliers, de forme horizontale, sont en rupture avec les travées répétées des barres. L'entrée de l'administration a, de même, été très soignée par le biais du auvent et des escaliers extérieurs.

  • Murs
    • béton
  • Toits
    ardoise
  • Couvrements
  • Couvertures
  • Statut de la propriété
    propriété de la région, Code : 0560001X

Bibliographie

  • BRANCHEREAU, Jean-Pierre, CROIX, Alain, GUYVARC'H, Didier, PANFILI, Didier. Dictionnaire des lycées publics de Bretagne. Geriadur liseoù publik Breizh. Histoire, culture, patrimoine, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2012, 656 p.

  • Aleyda Resendiz-Vazquez. L’industrialisation du bâtiment : le cas de la préfabrication dans la construction scolaire en France (1951-1973). Architecture, aménagement de l’espace, thèse de doctorat en Histoire des Techniques et de l’Environnement, Conservatoire national des arts et métiers - CNAM, 2010, 468 p.

  • Prost Antoine, "Jalons pour une histoire de la construction des lycées et collèges de 1960 à 1985". In: Lycées, lycéens,lycéennes, deux siècles d'histoire. Paris : Institut national de recherche pédagogique, 2005. pp. 459-478.

Documents figurés

  • Archives départementales du Morbihan : 110 J 1592. Jeu de photographies du CET de garçons d'Auray peu après sa construction, vers 1963, SN, SD (circa 1963).

    Archives départementales du Morbihan : 110 J 1592
  • AD 56 : 110 J 47. Guillou [Y.], Plans, 1958-1961

    Archives départementales d'Ille-et-Vilaine : 100 J 47
  • Archives départementales du Morbihan : 110 J 49, Plans et élévations, 1961-1967.

    Archives départementales du Morbihan : 110J49
  • Archives départementales du Morbihan : 110 J 48. Guillou [Y.], Plans et élévation de l'administration, décembre 1961.

    Archives départementales du Morbihan : 110 J 48
  • Archives départementales du Morbihan : 110 J 1592. Jeu de photographies du CET de garçons d'Auray peu après sa construction, vers 1963, SN, SD (circa 1963).

    Archives départementales du Morbihan : 110 J 1592
  • Archives municipales d'Auray : 1 W 2127. Cession par la ville à l’Éducation nationale. Terrain lycée technique (1958-1962).

    Archives municipales d'Auray : 1 W 2127

Annexes

  • AURAY_LP BERTRAND DUGUESCLIN_PLAN de masse 2020 :
  • AD56_110J48_ plans et élévations Administration_Y. Guillou architecte_déc 1961 :
  • AD56_110J48_Plan de l'internat_ Y. Guillou architecte_déc 1961 :
  • AD56_110J49_Plan Classes-Ateliers_Y. Guillou architecte, déc 1961 :
  • AD56_110J49_Plan extension ateliers_Y. Guillou architecte_1967 :
  • AD56_110J49_Plan Internat_ Y. Guillou architecte_déc 1961 :
  • Archives du LP Duguesclin_ Plan Restructuration des ateliers ébénisterie_L.Duret architecte_sept 2009 :
  • Archives du lycée_Collège d'enseignement technique. Auray_ca. 1960_plaquette comprenant des photos du CET en baraques dans l'ancienne caserne Du Guesclin :
Date(s) d'enquête : 2020; Date(s) de rédaction : 2020