Récit de vie du charpentier de marine, maître calfat et voilier, Yves Mével, d'après les témoignages de Patrick Lorgeré, de Pierre Aubin et Roger Goupil et le récit de Christian Drouhin

Christian Drouhin, "Les Amis du Vieux Saint-Jacut", août 1992, n°20, p.11.

Yves Mével est né à Lanmodez sur la côte du Trégor en 1902. Un ancien charpentier de marine, lui aussi originaire de Lanmodez, Jean Kerleau, l'a connu dans sa jeunesse. Yves Mével a pratiqué le métier de goémonier comme nombre de marins-paysans de la "presqu'île sauvage" de Pleubian. Il a commandé un dundee, armé au cabotage, dont il était le propriétaire, baptisé "Eugénie". Il a changé la quille de ce bateau au port de Ploumanac'h sur la grève, comme le faisaient régulièrement à cette époque (entre les deux guerres), les charpentiers des grèves. Par la suite, il a construit lui même son propre bateau de charge. Il est arrivé à Saint-Jacut en 1949, ne parlant que le breton ; Il va s'installer aux Ebihens, comme gardien, en prenant le relais de la mère de sa femme. C'est sur l'île qu'il a commencé à construire des plates pour ses patrons. Il est ensuite allé habiter "la Ville-Es-Chouins", après le Biord, sur la route du Guildo, puis il a ouvert son atelier au port du châtelet. Cet atelier était en fait une cabane en bois, située en haut de l'estran, au pied du calvaire des marins, sur le terrain de Monsieur d'Alincourt, propriétaire de la haute maison du Châtelet. Mais son chantier était sur la grève près des bateaux, où flottait souvent son établi, amarré à couple du canot en réfection. Son outillage était exclusivement manuel, sans électricité : rabots, chignole, ciseaux à bois, égoïne, fers pour calfater, latte de plomb pour prendre les gabarits, compas pour brocheter, quart de nonante pour calibrer le bouge et la tonture d'un pont, étuve rustique. Il était aussi voilier et fabriquait les voiles pour les sloops de pêche jaguens.

Yves Mével est décédé des suites d'un accident de mobylette en soir de juin 1979. Un canot de Saint-Jacut, appartenant à Alain Bachelot, s'appelle "Yffic" en souvenir du charpentier.