INSCRIPTIONS RELEVEES SUR LES STALLES BASSES DU CHOEUR (Y.-P. Castel)
Les inscriptions des stalles n´ont fait jusqu´ici l´objet d´aucune étude. Ne les a-t-on pas considérées comme de simples graffiti ne pouvant apporter aucun éclairage sur leur histoire. Certes, plus d´un de ces graffiti est issu d´une technique rudimentaire où le scripteur pique dans le bois, de petits points qu´il relie ensuite pour former des lettres (stalles 57, 63, 65). Pourtant nombre d´entre eux font appel à un savoir-faire élaboré, couvrant les dossiers de lignes organisées (stalles 60 et 62).
- Un examen attentif conduit à attribuer à cette profusion de signes des origines diverses. Occupation d´enfants meublant la longueur des offices religieux par une distraction fort compréhensible, marquage concerté de places bien définies.
- Les dessins paraissant gratuits sont rares, svastika (stalle 48) ou potence qui ignorent le fait religieux. Plus nombreux sont les monogrammes liturgiques. Mais la masse des inscriptions est constituée par des noms propres de personnes. Entièrement énoncés, ou réduits à des initiales, ils montrent la volonté de marquer une place au sein d´une hiérarchie qui ne touche d´ailleurs directement aucun de ces dignitaires ecclésiastiques, les chanoines installés dans les hautes rangées.
- Des cent inscriptions portées par les stalles basses de la cathédrale, les plus anciennes semblent être les monogrammes du Christ : IHS et de la Vierge : M A. Localisés du côté de l´Évangile (39, 41 et 51), nombreux sur les deux sièges qui voisinent l´accès médian aux stalles hautes, du côté du bas-choeur, ils indiquent des places privilégiées sans que l´on puisse en dire plus. Leur antériorité sur les autres graffiti se marque par le fait que nombre de scripteurs ont dû faire par la suite, des prouesses pour se frayer une place.
- Quant au relevé des noms de personnes, loin d´être inutile, il permet de dresser la géographie d´un choeur qui a vu, jusqu´à la suppression de l´évêché de Léon, en 1802, évoluer le chapitre et son personnel. Il engage à faire sortir de l´ombre quelques-uns parmi ceux qui ont hanté ces lieux séculaires, enfants de choeur, musiciens et chantres.
LES ENFANTS DE LA PSALLETTE
Bien avant la construction des stalles, au temps où s´achevait le choeur de la cathédrale, le 9 juillet 1455, l´évêque Guillaume Ferron avait fondé une psallette composée de six enfants dirigés par un maître de chevet et un maître de grammaire.
- Nos graffiti permettent de situer les huit stalles qui, au milieu du bas du choeur, leur furent réservées à partir du début du XVIe siècle (55 à 62). Mais la connaissance qu´on en recueille provient de curieuses coutumes qui se sont répandues aux siècles suivants.
- En 1631, dans la stalle 60 qu´il occupait, un des enfants de cette psallette disparue, François Morvan, sans doute tancé par quelques chanoines, n´a guère eu le loisir de finir un second graffito qu´il avait déjà esquissé quand il occupait la stalle voisine plus basse. Sans son condisciple, Alain Simon, nous n´aurions jamais su ce qu´il avait voulu dire en gravant ces simples mots : enfant de Heureusement, quatre ans plus tard, Alain est plus heureux. Il déploie sur le dossier 62 une belle inscription de quatre lignes : Alain Simon : enfant : de : la psallette : a : Sct : Paul : De : Léon : faict : Ian : 1635. Par esprit d´imitation, sans doute, ce dernier suit l´exemple d´Alain Le Borgne, recteur de Saint-Jean, l´une des sept paroisses du Minihy et de Mathieu Simon, autre recteur, qui occupent le siège voisin 60. Alain Simon, d´ailleurs, ne se sent-il pas prédestiné. On le retrouve choriste-clerc, neuf ans plus tard, avec Thomas Le Maigre (stalle 62), dans la liste des desservants de la cathédrale.
- Il se pourrait qu´en ce temps, il y ait eu du laisser aller parmi les enfants de la psallette, puisque un sur deux, François Morvan, Pierre Perron (stalle 58 puis 45) et Rolland Le Liérin (stalle 58), marquent un territoire où ils ne sont tout de même pas destinés à rester à perpétuité, à moins qu´ils ne s´engagent dans les ordres.
CHANTRES ET MUSICIENS
- Passé l´accès médian vers les stalles hautes, et montant vers le sanctuaire, les chantres prennent place accompagnés du «serpent», le musicien obligé des liturgies jouant de l´étrange instrument à neuf trous désormais complètement oublié. Gorrec est l´un de ces musiciens. Mais il n´a eu le temps de graver que les quatre premières lettres de sa fonction : serp (stalle 44). Il le fait, sans doute, vers 1655 où N. Dufaur officie en la qualité de basse-contre (stalle 46). Ce chantre ajoute aussi la qualification de «dessus» (dessus-contre) montrant l´étendue de la tessiture d´une riche voix.
- Hamon Cam, lui, était haute-contre (stalle 44). Prêtre choriste, il sert depuis l´enfance à la cathédrale. Le 10 décembre 1678, à sa demande, le Chapitre l´autorise à quitter son emploi pour faire le tour des cathédrales de France. Le congé sabbatique qu´on lui accorde alors se prolonge trois ans (Peyron, La cathédrale de Saint-Pol et le Minihy Léon, p. 122).
- Ainsi, à en croire les dates inscrites par les occupants du bas-choeur, de 1631 à 1679, les inscriptions envahissent les flancs de certaines stalles privilégiées. Si elles ne disent pas tout de l´histoire de l´illustre meuble, elles n´en éclairent pas moins certains aspects qui, sans ces graffiti, seraient totalement inconnus.
Liste des noms relevés sur les dossiers des stalles basses :
... Ian (53)
Allain (51)
Abguillerm Joseph (51)
Allain Ian (46 et 53)
André (43)
Balpin Iac (43)
C. M. six fois (63 et 65)
Cae (r) (45)
Cam I H (Joseph ? F (46)
Cambon (?) (51)
Caroff Clav (Claude) (41)
Coat Claude (43 et 51)
Cosk (er) (43)
Couarde (52)
Dain Ian Pierre, R. (57)
Dufour N., dessus, basse-contre, 1655 (46)
F. P. (60)
Fov. (61)
Fur F. 1670, (49). Fur F. p. 1679 (46)
Garion M. (51)
Gauti (er) (42)
Gilet Christien (59)
Gorrec, Serp (ent) (44)
Gouiv. (42)
Grall, Hamon (58). Grall Ha (54)
Guevel (?) F. p. (51)
Guill (aume) I. (58)
Guilu (41)
Gvilla (ume) (43)
Hamon Io (Joseph) (51)
Henry 1662 (41)
I.O. (43)
K (er) anguen Yvon, 1635 (61)
Kers. François (62)
L. I. L. (43)
L. Y. (39)
L Labare (43)
Larvor L. (37)
Laugio ? Pierre (54)
Le. Hervé (61)
Le-oserfa Hervé ? (57)
Le Borgne Alain, recteur de Sct An (60). Alain Le Borgne est vicaire de Saint-Jean, L´une des sept paroisses du Minihy. Sa tombe se voyait au début du XVIIIe siècle dans la chapelle Saint-André Le Barbu (Peyron, La cathédrale de Saint-Pol et le Minihy Léon, p. 3 et 88).
Le F. H. (54)
Le Goff P., p. 1674 (49)
Le Lierin Rolland (58). Cinquième des six enfants de la psallette en 1644 (Peyron, p. 4).
Le M. T. deux fois (62). Il s´agit de Thomas Le Maigre, le second des choristes clercs en 1644, avec Alain Simon et Guillaume Kerfourn (Peyron, p. 4)
Le Masson Ian (Jean) (51 et 52)
Le Roy Alain, deux fois (51)
Le Traon Jean (46)
Lez Ch. 1724 (43)
Lo. L. (37)
M. I (52)
M.L (37)
M. Nikl (Nicolas) (50)
Mer François, trois fois (62)
Merret Pol (43)
Morvan François, 1631, enfant de. (60). François M. (62). Premier des six enfants de la psallette de 1644 (Peyron, p.4)
P.D. (47)
P.G. (47)
P. I.G. (52)
P. Yv. (47)
Pellen (46)
Penchc (Penchoadic ?) I. (54)
Penchy F. (52). Perrot 1817 (58)
Pezron Pierre (58). Troisième des six enfants de la psallette de 1644 (Peyron, p. 4)
Picard, 1896 (50)
Picard I.L. (44)
Qvemmener Iacque (51)
Qvemmener Pierre 1724 (43 et 44)
R. F. p (rêtre ?) (45)
Renard C. (40 et 62)
Renard Ian et I. (52)
Renard L. (?) (44)
Rob. (59)
Roel (58)
Rol. (61)
S. G. (52)
S. L. (43)
Simon Alain, enfant de la psallette à Sct Paul de Léon, 1635 (60 et 62). Alain Simon est le premier des trois choristes clercs en 1644, avec Thomas Le Maigre et Guillaume Kerfourn (Peyron, op. cit. p. 4)
Simon Mathieu, recteur l´an 1635 faict (60). Mathieu Simon, sous-chantre, était vicaire des Toussaints, l´une des sept paroisses du Minihy en 1644 (Peyron, p. 3)
Simon Guillaume (52)
Tanguy (51).
Prêtre