Par arrêté du 3 mai 1968, signé pour le ministre d'Etat en charge des affaires culturelles, par Bernard Anthonioz, chef du bureau des travaux de décoration dans les édifices publics, Madame Claudine Henri est agréée pour la décoration du collège d'enseignement technique de Lanester. Cette peintre, professeur à l'école des Beaux-Arts de Nancy, a été proposée par l'architecte Yves Guillou pour réaliser : "un volume cylindrique de 3 m de hauteur et 1 m de diamètre, en terre chamottée et décorée par une composition de céramique, qui sera placée sur un talus entre la cour du bâtiment d'administration et celle des élèves(...)".

La commission de la création artistique, réunie le 4 avril précédent, avait considéré : "L'idée est intéressante, mais le parti mériterait d'être plus franchement traité. M. Alvard indiquera à l'artiste les modifications qu'il y aura lieu de faire à ce projet et acceptera éventuellement la nouvelle maquette." C'est ce que fait Julien Alvard, inspecteur principal de la création artistique et rapporteur devant la commission. Dans une note, datée du 22 avril, il précise que "de petites imperfections de détail demandaient à être corrigées" et que "Mademoiselle Henry [avait] présenté un autre aspect des structures sous jacentes à la céramique qui donne satisfaction aux vœux de la commission. Les arrêtes sont plus accusées et plus nettes et l'ensemble gagne en assurance et en facilité de lecture. Les couleurs ne sont pas en cause. Elles ont été choisies en fonction du bleu métallique du bâtiment et conviennent parfaitement." Monsieur Alvard ne revient pas sur la demande figurant dans son rapport initial de "donner plus franchement dans les figulines et le Bernard Palissy".

Cette démarche témoigne du rôle de l'inspecteur dans le processus de création mais aussi de ses références artistiques en matière de céramique. Il est vrai, dans le cas présent, que le sujet des "emblèmes marins" pouvait faire penser à l'artiste de la renaissance.

Le rôle de l'architecte mérite lui aussi d'être souligné. Pour argumenter sa proposition, Yves Guillou précisait que "les constructions industrialisées métalliques avec façades émaillées (...) imposaient une œuvre décorative absolument indépendante des bâtiments et isolée d'eux par des espaces suffisants". Il donnait également, dans son mémoire en date du 26 février 1968, des précisions importantes sur la forme de la sculpture et la technique utilisée par Claudine Henry :

" L'emplacement (...) a fait retenir un volume cylindrique, pouvant être vu sur toutes ses faces.

"Le grand totem sera d'abord sculpté en très léger bas-relief, puis cuit, émaillé, et recuit en plusieurs fois selon les régions et les tons à obtenir.

"Trois possibilités de sortie d'eau ont été envisagées, en accord avec les symboles marins qui seront évoqués, mais très librement traités : Neptune, Sirènes, Poissons, Algues, Filets, Vagues, etc... Un rythme vertical et horizontal architecture solidement l'ensemble du totem (...)

Se détachant sur le bleu assez fort des bâtiments, ce totem conserve, par contraste, une sobriété raffinée de tons.

La gamme des couleurs restera dans les roses, les gris et les bleus verts d'eau.".

Le totem a finalement été implanté entre la restauration scolaire du CET et l'externat. Lors de la reconstruction de l'établissement, en 1994, il n'a semble-t-il pas été déplacé. Il est situé désormais dans une cour entre la restauration scolaire, un externat et les ateliers, à proximité de la première. Les possibilités de sorties d'eau sont toujours apparentes, mais semble n'avoir jamais été utilisées.

Cette œuvre est, avec les ateliers, le seul témoignage du collège d'enseignement technique originel. Lors de la restructuration de l'établissement, devenu lycée polyvalent, aucune autre décoration ne fut commandée.