Le contexte de la construction de la nouvelle église de Pleugriffet:
En lieu et place de l'actuelle église Saint-pierre, se trouvait une première église dédiée à ce même vocable. Les informations concernant l’ancienne église Saint-Pierre sont assez minces. Cet édifice a été au cours des siècles plusieurs fois remaniés. Sa nef et son porche sud semblaient dater du XIIe siècle. Le reste de l’édifice datait pour partie du XIVe siècle. Aujourd'hui, il ne subsiste qu'une partie du pavement de l'ancienne église, volontairement conservé lors de l'édification du nouveau lieu de culte.
Au début des années cinquante, le maire de Pleugriffet, Eugène Lorillé, souhaite offrir à ses concitoyens une nouvelle église. Selon le maire, l’ancienne église, trop vétuste, menace de s'effondrer. Il devient urgent d'assurer la sécurité et le confort des fidèles par l'édification d'une nouvelle église plus spacieuse et plus moderne.
Ce projet s’inscrit dans un contexte de renouveau de l’architecture religieuse, entamé au tournant du XXe siècle. Ce regain d'intérêt est stimulé par de nombreux débats esthétiques autour de la forme que devait prendre ou non l'art sacré. L'arrivée de nouvelles techniques de constructions et le développement de nouveaux styles architecturaux poussent les architectes et ingénieurs à la réflexion. Ces réflexions prennent notamment corps pendant l'entre-deux guerre et après la Seconde Guerre mondiale.
Les architectes qui pour certains se spécialisent désormais dans l'architecture sacré, tentent de réinterpréter les symboles chrétien qui jalonnent l'histoire. Dans un premiers temps, l'art du pastiche et des néo roman, néo byzantin ou néo-gothique, sont préférés par les architectes classiques formés au milieu du XIXe siècle. D’autres, dont la formation est plus récente, décident de faire entrer l'architecture religieuse dans le XXe siècle. Petit à petit, le béton, dont les capacités techniques et esthétiques ne cessent de s'améliorer, s’immisce dans l'architecture religieuse. L'entre-deux guerre marque un tournant esthétique, les styles faisant référence au passé glorieux de l'art chrétien, sont progressivement délaissés au profit d'architecture plus moderne. Toutefois, il est important de noter que jusque dans les années cinquante, les deux parties pris cohabitent et offrent parfois de magnifiques édifices oscillant entre tradition et modernité.
Dans un contexte d'ode à la modernité, le maire de Pleugriffet suggère toutefois à l'architecte vannetais Guy Caubert de Cléry de s'inspirer de l'église néo byzantine Saint-Pierre de Maure-de-Bretagne, construite par Arthur Regnault entre 1894 et 1898. C’est donc sur recommandation du maire de Pleugriffet, que l’architecte se rend sur place pour observer et analyser cet édifice de style éclectique : « J’ai eu l’occasion de voir l’église de Maure-de-Bretagne et j’ai pu constater que mes études pour une église à coupole se rapprochaient de ce que vous désiriez. En ce moment nous mettons au point un avant-projet avec voûtes paraboliques qui seront à mon avis plus élancées et plus légères d’aspect que la voûte de l’église de Maure, sur un large plan carré cette voûte fait en effet un peu écrasée et sans monter plus haut je voudrais arriver à faire à Pleugriffet quelque chose de plus aérien. L’extérieur est cependant ingrat à traiter mais je pense y arriver ». (Arch. dép. Morbihan, 49 J 2152.)
L'église de Pleugriffet considéré comme "l'ultime avatar du néo-byzantin" par Philippe Bonnet1, a été très largement critiqué par Paul E.Koch, architecte-conseil du ministère de la Reconstruction et du Logement en 1957. « Du point de vue composition, ce projet est mauvais du fait qu’il accumule un trop grand nombre d’éléments dont les rapports et proportions rendent indécis le parti architectural. (...) Mais nous n’insisterons pas sur ces fautes d’architecture qui pourraient être améliorées par l’étude pour reprocher surtout à ce projet d’être conçu dans un esprit que l’on condamne depuis plus de cinquante ans.La part faite aux traditions ne doit pas aller à l’encontre de l’évolution de l’architecture. Les formes constructives du Moyen Âge ne sont plus valables de nos jours pour des raisons techniques et économiques » (Arch. dép. Morbihan, 49 J 2152) Les critiques du ministère de la Reconstruction et du logement émissent dès 1956, ne viennent toutefois pas en-tâcher l'engouement des Pleugriffetois pour leur église, en témoigne le bulletin municipal de décembre 1956 " Pleugriffet, à juste titre est fier de son église et de ceux qui la lui ont léguée comme héritage à protéger et entretenir."
1: BONNET, Philippe. "Églises du 20e siècle en Bretagne de la loi de séparation à Vatican II (1905-1962)". Bibliothèque de l´École des chartes, t. 163, 2005, p. 79-116.
Fils de Joseph Caubert de Cléry, Guy Caubert de Cléry est nommé architecte départemental le 15 décembre 1940 et le reste jusqu'en 1974.