Les archives de la seigneurie de Mézobran [Mézaubran, voire Maëzoubran] dans la paroisse de Minihy-Tréguier sont conservées aux Archives départementales des Côtes-d’Armor sous les cotes E 2366, E 2367 et E 2368. D’autres éléments se trouvent sous la cote 2 G 259. Selon Yannick Botrel (Les justices seigneuriales de l’évêché de Tréguier, 2002), la seigneurie de Mézobran constituait une mouvance et proche fief des Régaires et disposait d’une moyenne ou basse justice. Elle possédait des prééminences dans l’église-cathédrale de Tréguier. En 1768, la seigneurie dispose notamment du manoir de Kerrivoalan (édifice recensé) et du lieu noble de Kergonan. Jacques Briand qui habite Convenant Quellec à Minihy-Tréguier a réalisé un excellent travail de recherche sur la généalogie foncière de Convenant Quellec, exploitation agricole dont l’histoire est étroitement liée à celle du fief de Mezobran à qui elle a longtemps appartenu.
Le toponyme "Maizo bran" est mentionné sur le cadastre de 1835. L’institut national de l'information géographique et forestière (IGN) a retenu le toponyme "Mézobran". Les archives de la seigneurie mentionnent "Mezobran" (sans accent) ou encore "Maëzoubran" que l’on traduirait en français en "domaine du corbeau". La seigneurie devrait son nom "à des moines pilleurs qui auraient, d'après la légende, établi leur quartier général sur le site afin de rançonner les bateaux"1.
Outre de nombreuses exploitations agricoles situées dans, et hors de la paroisse de Minihy-Tréguier2, la seigneurie de Mézobran disposait d’un moulin à eau fonctionnant grâce à l’énergie des marées (moulin situé à 600 mètres au nord-nord-est). Cette installation hydraulique, nommée sur le cadastre ancien "Milin Mor Maizo Bran", littéralement le "moulin mer de Maizo Bran", a quasiment disparu à l’exception de sa digue de retenue. Le cadastre ancien révèle également la présence de deux routoirs (parcelles n° 565 et 566 : "tachen ar goas") et d'une pêcherie aménagés au fond de l’anse de Mézobran et alimentés par le ruisselet traversant le domaine. La pâture désignée comme "Paluden naissant" sur le cadastre appartient à la commune de Minihy-Tréguier mais est revendiquée par le marquis d’Argentré propriétaire du domaine en 1835.
La seigneurie de Mézobran appartient en 1412 au dénommé Jean de Lisle dont les armes sont "de gueules à dix billettes d’or [meuble d'armoiries à quatre angles droits, fait en forme de carré long], 4.3.2.1." ; en 1535 à Raoul de Lisle (L’Isle, "en Enes" ou "an Inizi"). En 1588, elle appartient à Isabelle de Lisle dite "douarière de Coataliou-Trégonan" après le décès de son époux Yves Le Guales. Les armoiries d’alliance conservées dans le manoir (aujourd’hui intégrées dans une niche) semblent correspondre au mariage d’Isabelle de Lisle et de Yves Le Gualès.
François Le Gualès [Le Goalès], époux de Anne Poënces est dit seigneur de Mézobran en 1589 alors que débute les Guerres de la Ligue : il est sénéchal de la ville de Tréguier. La famille Le Goalès blasonne "de gueules à un croissant d'argent, ramparé [accompagné] de six coquilles de même, trois en chef et trois en pointe".
Un siècle plus tard, la seigneurie appartient toujours à la famille de Le Goalès. La chapellenie Saint-Joseph de Mézobran a été fondée en 1662 par Rolland Le Gualès, chevalier et seigneur pour desservir la chapelle du manoir et la chapelle située dans l'église-cathédrale de Tréguier.
Marie Le Goalès à qui appartient la seigneurie, épouse le comte de Bourg (Marie-Eléonor du Maine) en 1675 dans la chapelle Saint-Joseph.
En 1757, la seigneurie échoue en copropriété entre Marie-Antoinette-Charlotte du Maine, comtesse du Bourg, veuve de Louis de Lostange, comte de Beduer et Alexandre-Marie de Saint-Maurice, comte de Montbarré [Montbarrey], colonel au régiment de grenadiers de France.
La seigneurie est vendue en 1762 à Madeleine-Marie-Agathe-Renée de La Bigotière, veuve de Olivier-Joseph Le Gonidec de Traissan (1702-1755), conseiller au Parlement de Bretagne.
Armand Mériadec Le Gonidec, comte de Traissan hérite de la seigneurie. Il épouse Marie Charlotte Joséphine de Morant. Leur fille, Victoire Le Gonidec de Traissan qui a épousé Louis Joseph du Plessis d'Argentré hérite de Mézobran en 1812. Leur fils, Charles hérite de Mézobran, il a épousé Marie Thomas de Bosmelet.
Charlotte du Plessis d'Argentré hérite de Mézobran en 1897, elle épouse Paul du Réau de La Gaignonnière en 1903.
Suite à l’incendie du manoir en 1920, Paul du Réau de La Gaignonnière le vend à Claude Adam (né en 1862) qui exploitait la ferme (qui comptait selon le recensement de 1906 six "domestiques" dont trois "laboureurs"). Sa fille, Anne Marie Adam (1897-1924, enterrée au cimetière de Minihy) s’est mariée le 5 juillet 1920 à Jean-Baptiste Le Goaziou.
Chargé d'études d'Inventaire du patrimoine à la Région Bretagne.