Les deux maisons situées de part et d’autre de la "Grande rue" (aujourd’hui rue Renan) et sur le quai du Jaudy sont sans doute les plus connues et les plus photographiées de la ville. Elles sont nommées localement "porte de Tréguier" alors même que la ville était dépourvue de fortification. Datables du début du 17e siècle, leurs constructions – parfaitement homogènes - semblent consécutives des nombreuses destructions survenues pendant les Guerres de la Ligue.
Le parti pris dans la distribution révèle la cohabitation entre activités commerciales ou artisanales en rez-de-chaussée (et la cave à usage d’entrepôt), accessible par une porte dédiée (côté rue Renan ex "Grande rue" et côté Jaudy), et des logements aux étages accessibles de manière totalement autonome par une autre porte et un escalier en vis (ainsi qu’une originale galerie distributive en encorbellement). Leur construction associe maçonnerie de pierre de taille pour le rez-de-chaussée et la tour et, pan de bois pour les étages (le pan de bois de la maison située au nord a été remplacé par une maçonnerie de moellon).
La tour d’escalier de la maison située au sud de la rue est datée de 1610 comme le montre un millésime sur le linteau de fenêtre du deuxième étage. Portes en arc plein cintre en granite ou en bois et cheminée Renaissance ont pu également être observées. Au nord, vers la rue Renan subsistent des étals en granite. L’examen de la façade principale - tournée vers le Jaudy - révèle la présence d’un écu lisse qui suggère que le propriétaire, noble, usait de son "droit de dormition" afin de pouvoir commercer. Une ancienne carte postale (image immatriculée IVR53_20182205836NUCA) montre une imposante statue surmontée d’un croissant de lune couronnant le sommet de la maison.
Cette demeure - menacée par un alignement de façade à la fin du 19e siècle - appartenait aux demoiselles Auziat en 1906. Elle a abrité pendant un temps "le Café du Port" dont madame Le Gallou est propriétaire en 1946.
Les photographies du début du 20e siècle du port de Tréguier révèlent la présence d'un alignement de trois maisons à tour d’escalier couverte en pavillon sur les quais du Jaudy. A la manière des manoirs ruraux, ces tours étaient surmontées dès l’origine d’une pièce haute servant au maître de la maison.
En raison de son intérêt patrimonial, l’ensemble urbain du bas de la rue Renan fait l’objet d’une protection comme site en 1943 mais des deux maisons formant cet ensemble, seule la maison sud (7 Place du Général de Gaulle) a fait l’objet d’un classement au titre des Monuments historiques en 1948. Cette maison a fait l’objet d’une restauration dans les années 1950 par Raymond Cornon et Jean Sonnier, architectes en chef des Monuments historiques.
En 2014, cet édifice a fait l’objet d’une étude architecturale dans le cadre des ateliers de l'école de Chaillot montrant son intérêt historique, documentaire et esthétique, mais aussi, son mauvais état sanitaire.
Chargé d'études d'Inventaire du patrimoine à la Région Bretagne.