Dossier d’œuvre architecture IA22133379 | Réalisé par
Lécuillier Guillaume (Contributeur)
Lécuillier Guillaume

Chargé d'études d'Inventaire du patrimoine à la Région Bretagne.

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  • inventaire topographique, Lannion-Trégor Communauté
Demeure dite "Chapellenie Saint-Yves" (Minihy-Tréguier)
Œuvre étudiée

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Schéma de cohérence territoriale du Trégor - Tréguier
  • Commune Minihy-Tréguier
  • Lieu-dit
  • Adresse 8 rue du Bourg
  • Dénominations
    dépendance, demeure
  • Appellations
    Chapellenie Saint-Yves, Maison du chapelain
  • Destinations
    maison

Encouragées par les propriétaires de la "Chapellenie de Saint-Yves", monsieur et madame Clément depuis bientôt près de trente ans, les connaissances historiques et archéologiques autour de cette demeure ecclésiastique se sont considérablement étoffées ces dernières années. L’organisation du congrès annuel de la Société d’histoire et d’Archéologie de Bretagne en septembre 2017 à Tréguier a été l’occasion pour les historiens d’étudier avec minutie la chapelle Saint-Yves et la Chapellenie. Thierry Hamon1 s’est ainsi penché sur les archives dont le célèbre testament de saint Yves tandis que Geneviève Le Louarn-Plessis2 s’est livrée à un exercice d’archéologie du bâti croisant observations in situ et analyse de la documentation. La redécouverte des armoiries de Yves Le Du - sur les cheminées de la Chapellenie mais aussi, dans la chapelle Saint-Yves sur les clés de voûte et un bénitier - est l’œuvre conjointe de Marie-Yvonne Gallais3 et de Thierry Hamon. Enfin, l’étude dendrochronologique menée par le laboratoire Dendrotech est venue confirmer, en partie du moins, les datations proposées par les historiens.

Armoiries, sources archivistiques et données dendrochronologiques ont ainsi permis de dater avec certitude la Chapellenie des années 1441-1443. Des éléments architectoniques d’un bâtiment antérieur datable stylistiquement de la seconde moitié du 14e siècle, comme les deux portes en arc brisé du mur de refend, semblent avoir été remployés lors la reconstruction du logis au 15e siècle.

Les photographies de 1973 et de 1974 du pré-inventaire de Minihy-Tréguier conduit par Nicole Chouteau et Viviane Maillen (assistées de Didier Richard, photographe) ont été intégrées au dossier d’Inventaire du patrimoine. Ces photographies sont aussi l’occasion d’observer l’évolution du bâti à plus de quarante année d’intervalle et de mesurer la qualité de la restauration.

1Thierry Hamon, docteur en droit, maître de conférences en histoire du droit à l’Université de Rennes 1.2Geneviève Le Louarn-Plessis, ancienne conservatrice générale du patrimoine. Elle est déléguée départementale des Côtes-d'Armor pour la Fondation du patrimoine.3Marie-Yvonne Gallais, enseignante et conseillère municipale de la commune de Minihy-Tréguier, déléguée au patrimoine.

La "Chapellenie Saint­-Yves" est une demeure ecclésiastique destinée à loger le chapelain de la chapellenie fondée en 1293 par Yves Hélory. La Chapellenie est désignée dans le testament de Yves Hélory écrit le 2 août 1297 comme la "maison adjacente" à la chapelle.

Armoiries, sources archivistiques et données dendrochronologiques (étude du Laboratoire Dendrotech en 2017) ont permis de dater l’actuel logis des années 1441-1443. Cette reconstruction - financée par une rente prélevée sur les offrandes et versée par le chapitre - est en effet due au chapelain Yves Le Du (alias Yvo Nigri en latin) qui blasonne "de sable à la fasce d’argent accompagnée de trois coquilles de même" sur trois des quatre cheminées que compte le logis. Selon un procès-verbal de 1601 lié à une querelle de prééminences entre les chanoines de Tréguier et les détenteurs de la seigneurie de Kermartin, ces armoiries surmontaient aussi la porte piétonne de l’entrée de la Chapellenie, tandis que l’arc de la porte charretière portait les armes de Kermartin. Dans la chapelle, on retrouvait aussi les armoiries du chapelain Le Du sur les clés de voûte mais aussi, sur le bénitier de la porte sud donnant sur la Chapellenie. Les travaux de reconstruction de la Chapellenie sont concomitants de la reconstruction de la chapelle Saint-Yves mais aussi, de la construction du cloître de la cathédrale Saint-Tugdual lancée sous l’épiscopat de Jean de Ploeuc (1442-1453).

Quelques éléments architectoniques comme la porte principale (sans son archivolte), les deux étroites portes en arc brisé du mur de refend et une petite baie en arc brisé actuellement orientée vers la chapelle au nord pourraient cependant avoir été empruntés à un édifice datable stylistiquement de la seconde moitié du 14e siècle.

La métairie semble également datable du milieu du 15e siècle : côté sud, fenêtres étroites à traverse (traverses disparues) et fenêtre étroite à meneau vertical ; côté nord, une porte basse en arc brisé et à l’étage une fenêtre à encadrement en bois finement mouluré et son linteau surbaissé orné d’une accolade.

La porte de "l’appartement" accosté au nord du logis semble contemporaine de la double porte monumentale et du mur de clôture vraisemblablement datables de la fin du 15e ou du début du 16e siècle.

Dans la façade nord, face à la chapelle Saint-Yves a été aménagé - probablement au début du 19e siècle - une boutique identifiable à son étal en pierre. Les nombreux pèlerins pouvaient trouver ici un souvenir de leur passage en ce lieu saint.

Dès 1768, la Chapellenie était louée à une certaine "Marie-Philippe". En 1770, la Chapellenie est finalement supprimée et unie au collège de Tréguier. Déclassée en exploitation agricole, la demeure est louée en 1774 à Gabriel Le Filoux et à Jeanne Le Troadec. En 1783, ce sont Pierre Loyer et Anne Le Caër (mariés en 1763) qui loue la Chapellenie avec l’obligation de nourrir les pigeons en hiver.

La demeure ecclésiastique est déclarée "bien national" à la révolution. En 1790, la mairie de Minihy-Tréguier s’installe "en l’une des chambres de la Chapellenie" (AD 22, 20 G 253, 21 février 1790, source citée par Christian Kermoal dans "Les notables du Trégor : Éveil de la culture politique et évolution dans les paroisses rurales (1770-1850)"). Le citoyen Louis-Marie Cabanac, époux de Angélique Yvonne Jacquette Dumont, achète la demeure en octobre 1795 pour la louer.

Percée dans l’élévation sud, la fenêtre ouest est "récente" tout en étant antérieure à 1973. A cet emplacement était accolé un bâtiment plus bas, filant vers le sud, dont subsiste la trace du toit. De même, un bâtiment à usage de dépendance - couverte en appentis en tuile plate - était accolé au mur de clôture est (ce bâtiment dont la construction est postérieure à l’établissement du cadastre en 1835 est visible sur les photographies de 1973).

D’un point de vue architectural, cette demeure s’apparente à un logis manorial dont elle reprend quelques-unes des caractéristiques comme la cour fermée par un mur de clôture à l'est flanqué de deux tourelles (dont l’une est couverte en poivrière), percé d’une porte charretière et d’une porte piétonne. La hauteur importante du mur permet de magnifier la porte charretière. La Chapellenie est également dotée d’une métairie, d’un puits, d’un colombier et d’un jardin clos planté d’arbres fruitiers (pommiers, poiriers, prunier et figuier recensés en 1794).

  • Période(s)
    • Principale : 2e moitié 14e siècle , (incertitude)
    • Principale : 2e quart 15e siècle , daté par source, datation par dendrochronologie
    • Secondaire : 4e quart 15e siècle, 1er quart 16e siècle , (incertitude)
    • Secondaire : 19e siècle, 20e siècle
  • Dates
    • 1293, daté par source
    • 1441, daté par source
    • 1442, daté par source
    • 1443, daté par source
    • 1441, datation par dendrochronologie
  • Auteur(s)

La Chapellenie et sa métairie sont implantées parallèlement à la chapelle Saint-Yves et immédiatement au sud. Ces bâtiments sont ainsi orientés vers le sud-est et profite d’un ensoleillement maximum tout en étant protégés des vents d’ouest.

La demeure est élevée en moellon "schisteux" de taille différente d’origine proximale à l’exception de l’entourage des ouvertures (portes moulurée et fenêtres à encadrement en cavet), des chainages d’angles et des rampants du pignon oriental en granite de l’île Grande à Trébeurden. Au centre de la façade principale a été aménagée une porte monumentale en arc brisé moulurée surmontée d’une archivolte en légère accolade. Au-dessus de cette porte, une petite niche abrite une statue géminée en "tuffeau vert" (identifiée comme saint François d'Assise et une sainte femme encapuchonnée). A l’origine, il s’agissait probablement d’un "placard à armoiries" sans doute, celles du commanditaire Yves Le Du. Les fenêtres ont perdu leur traverse ; deux fenêtres du rez-de-chaussée disposent d’un petit arc de décharge au-dessus du linteau.

D’une surface approximative de 160 mètres carrés (20 x 8 mètres environ), le logis comprend à l’origine deux pièces au rez-de-chaussée. Situé à l’est, la "salle basse" est reconnaissable à sa porte monumentale et à sa cheminée en granite à hotte oblique (à l’origine, dotée d’étagères latérales comme on peut le voir sur la photographie de 1973), ornée par des armoiries identifiées comme étant celles du chapelain Yves Le Du. Cette pièce commande les portes de l’escalier en vis assurant la distribution verticale et de l’escalier de la cave (cave aujourd’hui remblayée) mais aussi, la porte de la cuisine (porte de faible largeur en arc brisé) et la porte d’une autre pièce (porte également en arc brisé mais plus large). Cette pièce était à l’origine isolée de la cuisine par une cloison (fonction de cellier avancée par déduction, du fait de la proximité des portes et de la présence d’un jour en façade principale). Une seconde porte - en arc surbaissé - a été percée ultérieurement dans la façade principale afin de distribuer directement la cuisine. La cuisine comprend une cheminée en granite, un vaisselier avec un évier en partie basse et un passe-plat donnant sur l’escalier en vis afin de desservir les pièces de l’étage.

L’escalier en vis à marche monolithe en granite se poursuivait au niveau du premier étage par un escalier en bois (disparu). A l’origine, l’étage de comble n’existait probablement pas : il s’agissait certainement au 15e siècle de salles hautes sous charpente. Le premier étage comprend trois pièces et un "cabinet" dont deux chambres dotées chacune d’une cheminée à manteau de bois ornée d’armoiries et disposant chacune, au sud, d’une fenêtre à deux coussièges (bancs de hauteur différente) et au nord, d’une fenêtre plus étroite à coussiège unique. Une galerie en encorbellement – représentée en 1937 par Henri Frotier de La Messelière - permettait de relier la chambre haute orientale et la tourelle nord qui était alors sans doute à usage de latrines.

  • Murs
    • schiste moellon
  • Toits
    ardoise
  • Plans
    plan rectangulaire régulier
  • Étages
    1 étage carré, étage de comble
  • Élévations extérieures
    élévation à travées
  • Couvertures
    • toit à longs pans pignon couvert
    • pignon découvert
  • Escaliers
    • escalier dans-oeuvre : escalier en vis avec jour en maçonnerie
  • État de conservation
    bon état, restauré
  • Techniques
    • sculpture
  • Représentations
    • armoiries
  • Précision représentations

    Famille Le Du : "de sable à la fasce d’argent accompagnée de trois coquilles de même".

  • Mesures
    • l : 20 m
    • la : 8 m
  • Statut de la propriété
    propriété privée
  • Intérêt de l'œuvre
    à signaler
  • Éléments remarquables
    logis

Documents d'archives

  • Canton de Tréguier (22). Pré-inventaire de la commune de Minihy-Trégier par Nicole Chouteau et Viviane Maillen assistées de Didier Richard pour les photographies, 1973.

    Région Bretagne (Service de l'Inventaire du patrimoine culturel) : 152

Périodiques

  • LE LOUARN-PLESSIX, Geneviève. "Minihy-Tréguier, la Chapellenie" in Tréguier et son Pays, La justice en Bretagne, Actes du Congrès des 7-8-9 septembre 2017 de la Société d’Histoire et d’Archéologie de Bretagne. Mémoire de la Société d’Histoire et d’Archéologie de Bretagne, tome XCVI, 2018, p. 711-726.

    Collection particulière
  • HAMON, Thierry. "Le testament de saint Yves" in Tréguier et son Pays, La justice en Bretagne, Actes du Congrès des 7-8-9 septembre 2017 de la Société d’Histoire et d’Archéologie de Bretagne. Mémoire de la Société d’Histoire et d’Archéologie de Bretagne, tome XCVI, 2018, p. 695-709.

    Collection particulière
  • HAMON, Thierry. "Histoire de la chapellenie saint Yves et de ses chapelains (1293-1814)" in Tréguier et son Pays, La justice en Bretagne, Actes du Congrès des 7-8-9 septembre 2017 de la Société d’Histoire et d’Archéologie de Bretagne. Mémoire de la Société d’Histoire et d’Archéologie de Bretagne, tome XCVI, 2018, p. 727-749.

    Collection particulière

Documents figurés

  • Dessin du vicomte Frottier de La Messelière.

    Archives départementales des Côtes-d'Armor : 60 J 1-243

Annexes

  • "Minihy-Tréguier, la Chapellenie" par Geneviève Le Louarn-Plessix, 2018
  • La "Chapelainie [sic] de Saint-Yves" d'après les états de section du cadastre de 1835
Date(s) d'enquête : 2018; Date(s) de rédaction : 2019
(c) Région Bretagne
Lécuillier Guillaume
Lécuillier Guillaume

Chargé d'études d'Inventaire du patrimoine à la Région Bretagne.

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