Dossier d’œuvre architecture IA22133633 | Réalisé par
Lécuillier Guillaume (Contributeur)
Lécuillier Guillaume

Chargé d'études d'Inventaire du patrimoine à la Région Bretagne.

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  • enquête thématique régionale, Inventaire des héritages militaires en Bretagne
Demeure, Domaine de la Tour de Cesson, rue de la Tour (Saint-Brieuc)
Œuvre étudiée

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Saint-Brieuc - Saint-Brieuc
  • Commune Saint-Brieuc
  • Lieu-dit Pointe de Cesson
  • Adresse 105 rue de la Tour
  • Cadastre BR 1

D’inspiration néo-classique, puis néo-gothique voire "italienne" (sans doute par rapprochement stylistique avec la Villa Rohannec'h édifiée au début du 20e siècle), la demeure construite par Alexandre Glais de Bizoin entre 1852 et 1877 au pied de la Tour de Cesson et transformée ensuite par son neveu Eustache Ollitrault-Dureste fascine.

Cette demeure n’est pas un "manoir" mais reprend les codes du "château" : un logis de grandes dimensions accompagné de communs et de dépendances, lié à une vaste propriété rurale (située non loin de la ville) comprenant jardin, parc et ferme située un peu à l’écart. La Tour de Cesson est bien ici l’écrin qui magnifie la demeure : pour Ollitrault-Dureste, la tour est le plus bel ornement de son parc.

Fermés et gardiennés, le domaine et sa demeure ne sont longtemps connus que par les seules cartes postales officielles. Ils furent au 21e siècle, l’objectif d’escapades interdites alors que le domaine n’est plus gardienné. Même ravagée par un incendie, la demeure - rendue inaccessible par une barrière de chantier - se lit encore très bien avec, côté tour son châtelet d’entrée, et côté jardin, sa grande pièce rythmée de portes-fenêtres encadrée d'avant-corps... La demeure, même en mauvais état et envahie par la végétation, reste belle. Cristalliser cet état et sécuriser les ruines tout en donnant des clés de lecture et de compréhension, voilà sans doute l’objectif à venir pour cette demeure historique.

Cette demeure a été construite pour Alexandre Glais de Bizoin entre 1852 et 1877 dans un style néo-classique. Pendant sa construction, le futur propriétaire habite non loin de là, au manoir des Ligneries à Cesson. Plus qu’une simple demeure, Alexandre Glais de Bizoin crée un domaine centré autour des vestiges de la tour médiévale avec ferme, jardin d’agrément, parc et dépendances.

Après 1877, la demeure est transformée dans un style néo-gothique par son neveu Eustache Ollitrault-Dureste. Tourelles (faisant bow-window), accolades, arcs en plein cintre, "mâchicoulis bretons" de l’acrotère ou encore faux appareil de brique contribuent à donner à la demeure un côté médiéval. Tourné vers à la tour, le châtelet d’entrée de la demeure composé de deux tourelles, répond à celle-ci. Pour Eustache Ollitrault-Dureste, la "vieille tour" est "le plus bel ornement" de son parc (courrier du 25 octobre 1887).

A partir de 1921, la demeure sert de lieu de villégiature à la famille Combes.

Durant la Seconde Guerre mondiale, le 13 octobre 1940, la demeure est réquisitionnée par l’Allemagne nazie (sans doute pour loger officiers et soldats), qui construit des bunkers dans le parc à partir de fin 1942 - début 1943. Le commandant du service chargé de l’achat et de la répartition du matériel de cantonnement, trésorerie départementale allemande (Heeresunterkunftsverwaltung, HUV) demande, via le préfet des Côtes-du-Nord et le maire de Saint-Brieuc, à ce que la propriétaire entreprenne des travaux de réparation. En mauvais état, les couvertures coniques des tourelles de la demeure sont démontées.

Selon le Rapport Pinczon du Sel, réalisé immédiatement après-guerre par la Marine nationale, la demeure, désignée comme le "château", est "endommagée" sans plus de détail.

Dans les années 1960-1970, la couverture de la demeure est transformée.

Dans la nuit du 13 au 14 mars 1975, la demeure secondaire de la famille Combes est visée par un attentat à l’explosif du Front de libération de la Bretagne (FLB). Par cette action violente, l’organisation terroriste indépendantiste revendique le libre accès à la tour médiévale et au panorama de la Baie de Saint-Brieuc. La demeure est restaurée.

Le 16 avril 1982, Georgette Combes, la propriétaire du domaine s’éteint laissant huit héritiers en indivision.

La demeure et son domaine, progressivement abandonnés et occupés illégalement, font l’objet d’un constat d’abandon en juillet 2017 engagé par la Ville de Saint-Brieuc.

Le 25 janvier 2018, la demeure est détruite par un incendie. Une clôture de chantier est mise en place par la Ville de Saint-Brieuc afin d’interdire l’accès à la demeure.

Le 16 mars 2020, la demeure et le domaine de la Tour de Cesson sont passés dans le domaine public après une procédure d’expropriation.

Etat initial supposé : style néo-classique (post 1852)

La demeure est située à 30 m au Sud-ouest de la Tour de Cesson. Elle est implantée peu ou prou sur l’espace du fossé sec du château fort apparaissant sur le cadastre parcellaire de 1814.

Double en profondeur, le plan de la demeure est symétrique. Le corps central est encadré de deux avant-corps (partie de bâtiment faisant saillie sur une façade).

L’élévation principale est orientée vers le Nord-est : quand on arrive ou que l’on sort de la demeure, on voit immanquablement la tour médiévale (qui était beaucoup plus visible lors de la création de la demeure du fait de l’absence de végétation). Le corps central dispose d’une porte axiale précédée d’un perron, implantée face à la tour, encadrée de pierre de taille de granite gris et dotée d’un linteau en arc segmentaire.

L’élévation Sud-Ouest, ordonnancée à neuf travées, est orientée vers la lumière du midi et du soir, vers le jardin d’agrément situé au premier plan, vers Cesson et la ville de Saint-Brieuc au second plan.

Le corps central précédé d’un perron, abrite une grande pièce rectangulaire à cinq portes-fenêtres en arc plein cintre dotées de vitraux losangés. Cette grande pièce, baignée de lumière et ouverte sur le jardin, occupe une place centrale dans la demeure. Le corps central est surmonté d’un étage de comble avec balcon à balustrade vers le Sud-ouest couvert d’un toit à plusieurs pans brisés percés de plusieurs lucarnes en œil-de-bœuf (vers le Nord-est : unique ouverture en arc plein cintre au centre ; vers le Sud-ouest, ouverture en arc plein cintre au centre et ouvertures ovales sur les côtés).

Les deux avant-corps sont à deux niveaux - rez-de-chaussée et premier étage - couverts en pavillon. Les niveaux sont soulignés par des bandeaux horizontaux qui croisent les chaînes d’angle, les fenêtres sont rectangulaires.

Il n’y a pas d’accès à la terrasse (puisque c’est un toit). Les souches de cheminée en brique sont surmontées d’éléments de cheminée en terre cuite.

La demeure est dotée d’un sous-sol accessible par un escalier accolé à l’élévation Nord-ouest. Le sous-sol laisse apparaître une face dérocté au Nord-est.

Le gros-œuvre est réalisé en maçonnerie de moellon enduit. Chaînes d’angle, bandeaux horizontaux, corniches et entourages des ouvertures (avec petit larmier) sont en pierre de taille de granite gris. Les murs de refends sont en maçonnerie et en brique enduite. Des boiseries ornaient certaines pièces (photographies avant incendie et traces observées sur les murs).

Remarque : La couverture en ardoise des avant-corps est dissimulée par un acrotère (en brique enduit) orné de petits arcs en plein cintre rythmés par des "mâchicoulis bretons" en brique (consoles en pyramide inversée). L’acrotère et les pseudo-pinacles couronnant les chaînes d’angle sont en brique enduit. Cette touche néo-gothique correspond-t-elle au premier état ou au deuxième état ?

Deuxième état : style néo-gothique (post 1877)

A la manière d’un châtelet médiéval, la porte d’entrée est flanquée de deux tourelles de plan hexagonal sur deux niveaux, implantées en demi hors œuvre. L’axe des pans intérieurs de l’hexagone des tourelles est parallèle à ceux de la tour médiévale. Chaque tourelle est percée de six ouvertures, dont une porte au rez-de-chaussée. Ces grandes ouvertures rectangulaires sont ornées d’un larmier à accolade. Les tourelles, dont la couverture est soulignée par de faux mâchicoulis, reçoivent un toit conique (en ardoise ?) orné d’un haut épi de faitage.

Les élévations Nord-Ouest et Sud-est sont chacune dotées d’une tourelle en demi hors œuvre sur deux niveaux à la manière d’un bow-window (littéralement, fenêtre en arc, c’est à dire une fenêtre en encorbellement par rapport à la façade). Ces tourelles sont coiffées d’un toit plat en zinc.

Les tourelles sont en brique (hypothèse) et en ciment armé.

Les élévations Nord-est (uniquement le corps central et les tourelles) et Sud-ouest sont traitées en faux appareil de brique tout comme les deux tourelles des élévations Nord-Ouest et Sud-est (état connu par des cartes postales et état actuel). Le reste des façades est traité en enduit grossier texturé avec du gravier.

Les huisseries des portes et fenêtres, d’abord peintes en blanc sont repeintes en noir ; les chaînes d’angle en pierre de taille sont enduites pour donner un aspect uni (état connu par des cartes postales).

Les fenêtres de l’étage sont dotées de volets extérieurs en bois.

Certaines baies (tourelles Nord-est, bow-window Sud-est et élévation Sud-Ouest) sont dotées d’un brise lumière ajouré.

Les fenêtres basses des tourelles de l’élévation Nord-est sont dotées de grilles.

Une fenêtre de la façade Nord-est est murée (état connu par des cartes postales ; état actuel) : cet espace pourrait correspondre à une salle de bain.

Etat intermédiaire (Après-guerre)

Les tourelles de l’élévation Nord-est, reçoivent un toit plat en zinc.

 

Etat intermédiaire (années 1960 - 1970)

Une nouvelle couverture en ardoise en pavillon - beaucoup plus imposante que celle d’origine - couvre l’intégralité de la demeure (corps central et avant-corps).

Des volets métalliques sont posés pour fermer les ouvertures du rez-de-chaussée et de l'étage.

Etat après incendie du 25 janvier 2018 (2023)

L’incendie a détruit la couverture, la charpente, les planchers, l’escalier et de nombreux éléments de second œuvre. Il laisse apparaitre les poutrelles métalliques tordues qui soutenaient le plancher de l’étage. Ne subsistent que les murs en maçonnerie et quelques éléments qui ont résisté à la chaleur : les volets métalliques, les radiateurs, le lustre en fer forgé du vestibule d’entrée, les portes-fenêtres Sud avec leurs huisseries en bois et les plombs des vitraux, sur les murs du papier peint aux motifs floraux... Le salon japonais situé au Sud conserve partiellement son décor néo-classique en stuc du plafond et les traces des boiseries disparues sur ses murs recouverts par des graffitis.

Une clôture de chantier interdit l’accès à la demeure. La végétation a repris ses droits, tant à l’extérieur avec de vigne vierge qui recouvre une partie des façades, qu’à l’intérieur de la demeure avec des Buddleia de David (appelé plus communément "l'arbre à papillons").

  • Murs
    • granite
    • moellon
    • maçonnerie enduit
  • Toits
    ardoise
  • Plans
    plan rectangulaire régulier
  • Étages
    sous-sol, 1 étage carré
  • Élévations extérieures
    élévation ordonnancée
  • Couvertures
    • toit à longs pans brisés
    • toit en pavillon
  • Typologies
    néo-classique (3e quart 19e siècle) ; néo-gothique (4e quart 19e siècle)
  • État de conservation
    mauvais état, menacé, vestiges
  • Techniques
    • maçonnerie
    • fonderie
    • menuiserie
    • décor stuqué
    • peinture
    • papier peint
  • Mesures
    • l : 24 m (environ)
    • la : 13 m (environ)
  • Statut de la propriété
    propriété de la commune, domaine appartenant à la Ville de Saint-Brieuc.
  • Intérêt de l'œuvre
    maison d'homme célèbre, à signaler
  • Éléments remarquables
    demeure
  • Sites de protection
    abords d'un monument historique, site patrimonial remarquable

Bibliographie

  • MESLÉ-CAROLE, Anthony. "La Tour de Cesson et son domaine (Saint-Brieuc, Côtes d'Armor). Redécouverte d'un patrimoine et explorations paysagères". École nationale supérieure d'architecture de Versailles et CY Cergy-Paris Université, Master 2 Jardins historiques sous la direction de Stéphanie de Courtois, historienne de l'art et Denis Mirallié, paysagiste, patrimoine et paysage, 2022, 184 p. et 95 p. (annexe).

    Archives municipales de Saint-Brieuc
  • LAMOUR, Alain. LAMOUR, Claudine. Saint-Brieuc. Le mystérieux domaine de la tour de Cesson. Plérin : Imprimerie Roudenn Grafik, autoédition, 2023, 170 p.

    Archives municipales de Saint-Brieuc : 279837

Périodiques

  • LE GOUALHER, Jacques. "Cesson, l’environnement d’une forteresse médiévale". Mémoires de la Société d'émulation des Côtes-d'Armor, Histoire et archéologie, tome CXXVII, 1998, p. 195-230.

Annexes

  • Alexandre Glais-Bizoin (1800-1877), propriétaire du domaine de 1852 à 1877
  • Eustache Ollitrault-Dureste (1834-1919), propriétaire du domaine de 1877 à 1919
  • La famille Combes, propriétaire du domaine de 1921 à 2020
  • La distribution des pièces dans la seconde moitié du 20e siècle (témoignage oral de Madeleine Colin collecté par le service des archives municipales de Saint-Brieuc en 2021)
Date(s) d'enquête : 2023; Date(s) de rédaction : 2023
(c) Région Bretagne
Lécuillier Guillaume
Lécuillier Guillaume

Chargé d'études d'Inventaire du patrimoine à la Région Bretagne.

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Articulation des dossiers
A rapprocher de
(composition)

Château fort et tour de Cesson, Domaine de la Tour de Cesson, rue de la Tour (Saint-Brieuc)

Commune : Saint-Brieuc
Lieu-dit : Pointe de Cesson
Adresse : 105 rue de la Tour
(juxtaposé)

Communs et dépendances dits la grange, Domaine de la Tour de Cesson, rue du Commandant Le Conniat, rue de la Tour (Saint-Brieuc)

Commune : Saint-Brieuc
Lieu-dit : Pointe de Cesson, Le Bourrivet
Adresse : rue , du Commandant Le Conniat, 105 rue de la Tour
(juxtaposé)

Conciergerie, Domaine de la Tour de Cesson, rue de la Tour (Saint-Brieuc)

Commune : Saint-Brieuc
Lieu-dit : Pointe de Cesson
Adresse : 105 rue de la Tour
(juxtaposé)

Ensemble fortifié (Po 5), Domaine de la Tour de Cesson, rue de la Tour (Saint-Brieuc)

Commune : Saint-Brieuc
Lieu-dit : Pointe de Cesson
Adresse : 105 rue de la Tour
(juxtaposé)

Ferme dite métairie du Bourrivet, Domaine de la Tour de Cesson, rue du Commandant Le Conniat, rue de la Tour (Saint-Brieuc)

Commune : Saint-Brieuc
Lieu-dit : Pointe de Cesson, Le Bourrivet
Adresse : rue , du Commandant Le Conniat, 105 rue de la Tour
(composition)

Jardin d'agrément et parc, Domaine de la Tour de Cesson, rue de la Tour (Saint-Brieuc)

Commune : Saint-Brieuc
Lieu-dit : Pointe de Cesson
Adresse : 105 rue de la Tour
(juxtaposé)

Murs de clôture, murs de soutènement avec parapet (avec emplacements de tir) et portails, Domaine de la Tour de Cesson, rue de la Tour (Saint-Brieuc)

Commune : Saint-Brieuc
Lieu-dit : Pointe de Cesson
Adresse : 105 rue de la Tour